ARRÊT N° 471 DU 08 MARS 1996 (CAA) – COUR SUPRÊME – CHAMBRE JUDICIAIRE – FORMATION CIVILE

RESPONSABILITE – NOTAIRE – FAUTE GRAVE DE NEGLIGENCE ET FAUTE PROFESSIONNELLE – NOTAIRE N’ETANT PAS ASSURE NI DE L’EXISTENCE DU TITRE FONCIER DE L’IMMEUBLE VENDU NI DE L’ACCORD AVANT D’ENCAISSER LE PRIX TOTAL

La COUR,

Vu les mémoires produits par le défendeur au pourvoi ;

Sur le moyen unique de cassation tiré du défaut de base légale pris en ses deux branches résultant d’une part, de l’obscurité des motifs et d’autre part, de l’insuffisance des motifs.

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Abidjan n° 471 du 08 mars 1996) que Dame veuve A, informée de la vente d’une villa sise au Groupement Foncier de Côte d’Ivoire de X lot X appartenant à R et de ce que le notaire commis à cet effet était Maître H…., a pris l’attache du notaire qui lui a confirmé la réalité de cette vente et lui a délivré une attestation en date du 23 novembre 1991 indiquant l’option de la Dame A , le versement par l’acheteur des 10% du prix de la villa et le délai d’un mois dans lequel interviendra la vente ;

Que ce délai étant expiré, la Dame A a continué de régler entre les mains du notaire 4.300.000 F le 08 janvier 1992, 580.000 F/CFA et 200 000 F le 11 février 1992 représentant la totalité du prix de vente de l’immeuble et les honoraires du notaire ;

Qu’ayant reçu les clés de la villa en pleine dégradation, elle a construit une clôture et d’autres impenses d’un montant global de 4.655.222 F/CFA ;

Qu’ayant été informée plusieurs mois après que la vente de l’immeuble ne pouvait plus se réaliser pour non remise au notaire du titre foncier par le propriétaire A a saisi le Tribunal Civil d’Abidjan, lequel, par jugement n° 153 du 09 mars 1994, a condamné Maître H… à payer
5.080.000 F/CFA au titre de restitution du prix de vente de l’immeuble, 4.655.222 F/CFA au titre du remboursement du coût des impenses et 300.000 F/CFA à titre de dommages-intérêts;

Que sur appel des deux parties, la Cour d’Appel d’Abidjan, par l’arrêt n° 471 du 08 mars 1996 présentement attaqué, a confirmé en toutes ses dispositions le jugement ;

Attendu qu’il est fait grief à la Cour d’Appel d’Abidjan de s’être, pour condamner la notaire à rembourser les impenses réalisées sur l’immeuble, bornée à soutenir d’une part, qu’elle avait commis une négligence grave, sans chercher comme l’y invitait la demanderesse à qui avaient profité les impenses d’autre part, qu’elle avait donné son avis favorable à la réalisation des impenses, sans préciser les moyens de fait et de droit qui concourent à étayer une telle affirmation ;

Que ce faisant, la Cour d’Appel a manqué de donner une base légale à sa décision par l’obscurité et l’insuffisance de ses motifs ;

Mais attendu que pour statuer comme elle l’a fait la Cour d’Appel a mis en exergue la faute de négligence et la faute professionnelle du notaire qui ne s’est pas assurée ni de l’existence du titre foncier de l’immeuble à vendre ni de l’accord inconditionnel du propriétaire de la villa, avant d’encaisser le prix total de l’immeuble ainsi que la totalité de ses honoraires pour l’opération de vente qu’elle devait effectuer et surtout avant de remettre à l’acheteur les clés de la villa, la rassurant et l’encourageant ainsi à procéder aux réparations sur la maison et à la construction de la clôture ;

Que dans ces conditions, point n’est besoin de savoir à qui profitent les impenses réalisées par l’acheteur ;

Qu’il résulte que les motifs de la Cour d’Appel sont clairs et suffisants et donnent une base légale à la décision ;

Qu’il suit que le moyen unique de cassation pris en ses deux branches n’est pas fondé ;

Qu’il y a lieu de rejeter le pourvoi ;

PAR CES MOTIFS :

Rejette le pourvoi formé par Chantal H…contre l’arrêt n° 471 en date du 08 mars 1996 de la Cour d’Appel d’Abidjan Chambre civile et commerciale ;

Laisse les dépens à la charge du Trésor public ;

PRESIDENT : M. HAMZA T.