LES TERRES D’UNE SUCCESSION OUVERTE NON RECLAMÉES APRES TROIS (3) ANS CLASSEES PARMI LES TERRES SANS MAÎTRES EN CÔTE D’IVOIRE

Les terres sans maîtres sont des terres qui sont identifiées comme telles par l’Agence Foncière Rurale (AFOR) ; Agence créée par le décret n° 2016-590 du 03 Août 2016 et qui a pour Directeur général, Monsieur BAMBA Cheick Daniel.

L’AFOR, à la suite d’une procédure imposée par le décret n° 2023-378 du 3 mai 2023 identifie les terres ci-dessous comme n’ayant pas de maîtres lorsque les conditions sont remplies :

1°) les terres d’une succession ouverte non réclamées après trois (3) ans ;

2°) les terres coutumières dépourvues de certificats fonciers ;

3°) et les terres concédées sur lesquelles les droits n’ont pas été consolidés.

En principe, à l’ouverture d’une succession, les biens et les terres sont réclamés par les héritiers ou légataires mais, lorsque trois (3) années après l’ouverture d’une succession, les terres ne font pas l’objet de réclamation, parce que soit il n’y a pas d’héritiers connus, soit les héritiers connus y ont renoncé ;

Les terres non réclamées trois (3) années après l’ouverture d’une succession ne sont déclarées sans maîtres qu’à l’issue d’une procédure allant d’une enquête de commodo et incommodo à des auditions et à la constitution d’un rapport justifiant la constatation du défaut de maître.

L’enquête de commodo et incommodo est diligentée par le Sous-préfet compétent.

Il faut entendre par enquête de commodo et d’incommodo, une enquête préalable effectuée par l’Administration, avant la prise de certaines décisions telle qu’une expropriation, une déclaration de terre sans maître…

Dès le départ, pour être nommée curatrice de ces terres, l’AFOR demande au Tribunal de Première Instance du lieu de l’ouverture de la succession, « l’envoi en possession » c’est-à-dire demander au juge de vérifier que les conditions de rentrer en possession de cet héritage à la place des héritiers sont bien remplies et l’autoriser à entrer en possession de ces terres non réclamées.

L’AFOR accompagne sa demande d’envoi en possession présentée au Tribunal :

1°) des résultats de l’enquête de commodo et d’incommodo diligentée par le Sous-préfet ;

2°) de l’acte de décès du propriétaire foncier ou du titulaire d’un certificat foncier ou d’un jugement supplétif d’acte de décès établit par l’AFOR en l’absence d’un acte de décès ;

3°) et de l’attestation de non-réclamation de la succession établie par le greffe.

Lorsque l’AFOR obtient du Tribunal la décision de l’envoi en possession, elle mène une autre enquête que le Directeur général confie à un Commissaire enquêteur, inscrit sur la liste nationale des commissaires enquêteurs.

Le Commissaire enquêteur affiche l’annonce de l’ouverture de l’enquête aux lieux ci-dessous :

1°) à la Sous-préfecture ;

2°) dans les Services déconcentrés de l’AFOR ;

3°) dans les Services du ministère en charge de l’Agriculture ;

4°) au village concerné ;

5°) dans les villages et Sous-préfectures limitrophes ;

6°) et le cas échéant, aux derniers domicile et résidence du dernier propriétaire ou titulaire de certificat foncier connu.

Pour diffuser largement l’ouverture de l’enquête de constatation du défaut de maître sur des terres données, il est fait appel également :

1°) aux crieurs publics ;

2°) aux griots ;

3°) ou tout autre moyen servant à la diffusion des messages dans les villages.

Dans sa recherche de collecte d’informations sur la filiation, la situation matrimoniale, la nationalité et la localité d’origine du défunt, le Commissaire enquêteur procède à l’audition :

1°) des voisins limitrophes du bien foncier ;

2°) des voisins limitrophes des derniers domicile et résidence du défunt ;

3°) des occupants du bien foncier ;

4°) des occupants des derniers domicile et résidence du défunt ;

5°) du secrétaire du Comité villageois de gestion foncière rurale ;

6°) du chef du village du lieu de situation du bien foncier ;

7°) le cas échéant, du chef de terre ;

8°) et de toute autre personne susceptible de détenir des informations utiles au bon déroulement de l’enquête.

Le Commissaire enquêteur dresse procès-verbal de ces auditions et une fois l’enquête du Commissaire enquêteur achevée, il est constitué le dossier ci-dessous de constat de défaut de maître :

1°) de l’acte nommant l’AFOR comme curatrice du bien foncier ;

2°) de l’acte de décès du propriétaire ou du titulaire du certificat foncier;

3°) du procès-verbal d’audition établi par le commissaire enquêteur ;

4°) de la copie du certificat foncier, ou de l’état foncier, ou de tout autre document attestant de la propriété du bien foncier ;

5°) des informations relatives aux droits d’usage et activités qui sont exercés sur le bien foncier concerné ;

6°) et toutes informations permettant d’apprécier l’opportunité d’une procédure de constatation des terres sans maître.

Pour établir éviter toutes contestations sur l’exactitude des auditions, le procès-verbal d’audition est lu par le Commissaire enquêteur en séance publique devant l’assemblée du village sur le territoire duquel est situé le bien foncier.

Le Commissaire enquêteur :

1°) annonce donc le lieu et la date de la séance publique de présentation du procès-verbal d’audition en effectuant son affichage dans les endroits ci-dessous, après avoir signalé cette formalité au Sous-préfet et au Président du Comité villageois de gestion foncière rurale au moyen d’un certificat d’affichage transmis par le Directeur général de l’AFOR :

a) le village, à la sous-préfecture ;

b) à la mairie ;

c) à la chambre d’agriculture ;

d) à la préfecture ;

e) aux services déconcentrés du ministère en charge de l’Agriculture, f) aux services locaux de l’AFOR ;

g) et, dans le cas échéant, aux derniers domicile et résidence du dernier propriétaire ou titulaire du certificat foncier connu ;

h) si possible, les organes de gestion foncière rurale du lieu de situation de la parcelle.

Le Commissaire enquêteur relaie encore cette annonce au niveau du village par :

a) les crieurs publics ;

b) les griots ou tout autre moyen servant à la diffusion de l’information et des messages.

Dans le cas où le bien foncier concerné est exploité, une notification est adressée aux occupants.

2°) ouverture d’un registre des oppositions par le Commissaire enquêteur et tenu par le Comité villageois de gestion foncière rurale.

3°) clôture de la publicité, trois (3) mois après la séance publique évoquée ci-dessus, en séance publique par :

a) la lecture et la discussion des oppositions formulées en séance et sur le registre ;

b) la consignation dans un procès-verbal du point a) ci-dessus ; Procès-verbal signé par le Commissaire enquêteur et le Président du Comité villageois de gestion foncière rurale.

La publicité close :

1°) le procès-verbal de publicité est joint au dossier ;

2°) le Comité villageois de gestion foncière rurale constate l’inexistence de réclamation du bien concerné ;

3°) établissement du procès-verbal adressé au Directeur général de l’AFOR.

4°) contrôle de la régularité des pièces du dossier par le Directeur général de l’AFOR et production d’un rapport justifiant la constatation du défaut de maître.

L’issue de cette procédure :

1°) soit l’existence d’héritiers, de légataires, d’hypothèques ou de passifs : fin de la procédure et le Directeur général de l’AFOR saisit le Tribunal devant lequel la succession est ouverte ;

2°) soit l’absence d’héritiers, de légataires, d’hypothèques ou de passifs : transmission du dossier complet au Ministre chargé de l’Agriculture par le Directeur général de l’AFOR pour la préparation du projet de décret de constatation du défaut de maître.

N. Kouadjané