CHAPITRE 6 : DE LA LIQUIDATION ET DU PARTAGE (2019)

SECTION 1 :

DE L’ACTION EN LIQUIDATION ET DU PARTAGE

ARTICLE 82

Nul ne peut être contraint à demeurer dans l’indivision et le partage peut être toujours provoqué, nonobstant prohibitions et conventions contraires.

Toutefois, l’on peut convenir de suspendre le partage pendant un temps limité.

ARTICLE 83

L’action en partage des cohéritiers mineurs ou majeurs sous tutelle et celle des cohéritiers présumés absents, est exercée par le représentant légal.

ARTICLE 84

Si les héritiers sont d’accord, le partage peut être fait dans la forme et par tel acte conformes aux règles en vigueur.

Toutefois, s’il y a parmi eux des mineurs ou des majeurs sous tutelle, même régulièrement représentés, les héritiers capables sont solidairement tenus des préjudices résultant du partage, occasionnés aux héritiers mineurs ou majeurs sous tutelle.

Toute liquidation-partage commence par un inventaire. A défaut d’inventaire, les héritiers que la loi entend protéger peuvent prouver la consistance de la succession par tous moyens.

ARTICLE 85

Tout héritier peut requérir l’apposition des scellés dans son intérêt ou dans l’intérêt de ses cohéritiers incapables.

Le même droit appartient aux représentants des incapables.

ARTICLE 86

Les créanciers peuvent requérir l’apposition des scellés en vertu d’un titre exécutoire ou d’une permission du juge.

ARTICLE 87

Les formalités pour la levée des scellés et la confection de l’inventaire sont réglées par les lois sur la procédure.

ARTICLE 88

Si l’un des cohéritiers refuse de consentir au partage, ou s’il s’élève des contestations soit sur le mode d’y procéder, soit sur la manière de le terminer, le tribunal prononce comme en matière ordinaire ou nomme s’il y a lieu, pour les opérations de partage, un notaire, un commissaire de Justice ou toute personne qualifiée dont il précise la mission et sur le rapport duquel il tranche les contestations.

Il est procédé, dans les conditions fixées par le tribunal, à l’estimation des meubles et des immeubles composant la succession.

En ce qui concerne les immeubles, il doit être précisé la base de l’estimation et s’ils peuvent être ou non commodément partagés. Dans l’affirmative, de quelle manière et la valeur de chacune des parts qu’on peut en former.

ARTICLE 89

Chacun des cohéritiers peut demander sa part en nature des meubles et immeubles de la succession.

Néanmoins, s’il y a des créanciers saisissants ou opposants ou, si la majorité des cohéritiers juge la vente nécessaire pour l’acquit des dettes ou charges de la succession, les meubles et les immeubles sont vendus dans les formes prévues par le tribunal.

Si les immeubles ne peuvent être commodément partagés ou attribués, il doit également être procédé à la vente.

Les héritiers bénéficient d’un droit de préemption.

Ils disposent d’un délai d’un mois pour lever l’option. En cas de concours entre plusieurs héritiers, la préférence est accordée au plus offrant.

L’héritier acquéreur dispose d’un délai de trois (3) mois pour en payer le prix.

ARTICLE 90

Chaque cohéritier fait rapport à la masse des sommes dont il est débiteur envers la succession.

ARTICLE 91

Après que les meubles et immeubles ont été estimés et vendus, s’il y a lieu, il est procédé, dans les conditions prévues par le tribunal, à la formation de la masse générale et à la composition des lots.

ARTICLE 92

Dans la formation et la composition des lots, le morcèlement des héritages et la division des exploitations doivent être évités autant que possible.

Chaque lot est composé, autant que possible, soit en totalité, soit en partie, de meubles ou d’immeubles, de droits ou créances de valeur équivalente.

ARTICLE 93

L’inégalité des lots en nature se compense par retour soit en rente, soit en argent.

ARTICLE 94

L’attribution des lots se fait par tirage au sort en cas de désaccord.

ARTICLE 95

Avant de procéder au tirage des lots, chaque copartageant est admis à proposer ses réclamations contre leur formation.

ARTICLE 96

Les règles établies pour la division des masses à partager sont également observées dans la subdivision à faire entre les souches copartageantes.

ARTICLE 97

S’il s’élève des contestations, le notaire, le commissaire de Justice ou l’expert commis comme il est dit à l’article 88 dresse procès-verbal des difficultés et des dires respectifs des parties et les renvoie devant le tribunal.

ARTICLE 98

Les lots définitivement formés et le tirage au sort effectué, il est dressé procès-verbal des opérations par le notaire, le commissaire de Justice ou l’expert commis.

ARTICLE 99

S’il a été procédé par un commissaire de Justice ou un expert, le partage doit être homologué par le tribunal.

ARTICLE 100

L’homologation est également requise dans tous les cas où l’un des copartageants est mineur ou majeur protégé, lorsque le partage est fait par un notaire, un commissaire de Justice ou un expert.

ARTICLE 101

Toute personne, même parente du défunt, qui n’est pas successible, et à laquelle un cohéritier aurait cédé son droit à la succession, peut être écartée du partage, soit par tous les cohéritiers, soit par un seul, en lui remboursant le prix de la cession.

ARTICLE 102

Après le partage, remise doit être faite à chacun des copartageants, des titres particuliers aux objets qui lui seront échus.

Les titres d’une propriété divisée restent à celui qui a la plus grande part, à la charge d’en aider ceux de ses copartageants qui y auront intérêt, quand il en sera requis.

Les titres communs à toute l’hérédité seront remis à celui que tous les héritiers ont choisi pour en être te dépositaire, à la charge d’en aider les copartageants, à toute réquisition. S’il y a difficulté sur ce choix, il est réglé par le juge comme en matière de référé.

SECTION 2 :

DES DISPOSITIONS PARTICULIERES

ARTICLE 103

Tout héritier qui, antérieurement au décès du de cujus, participait avec ce dernier à l’exploitation d’une entreprise, industrielle, agricole, artisanale ou commerciale dépendant des biens de la succession, a la faculté de se faire attribuer celle-ci par voie de partage, après estimation par expert commis.

S’il le requiert, il peut exiger de ses copartageants, pour le paiement de la soulte, des délais qui ne pourront excéder cinq (5) ans.

Le conjoint survivant peut se faire attribuer, sur estimation d’expert, l’immeuble ou partie de l’immeuble servant d’habitation aux époux ou le droit au bail des locaux leur servant habituellement d’habitation. A défaut de conjoint survivant, tout héritier peut en obtenir l’attribution.

L’estimation et l’attribution préférentielle se font à l’amiable. En cas de litige, le tribunal statue à la requête de la partie intéressée.

ARTICLE 104

Seuls les héritiers qui sont susceptibles de les faire valoir par eux-mêmes peuvent prétendre à l’attribution des droits antérieurement détenus par le de cujus portant sur l’usage du sol.

ARTICLE 105

Lorsque plusieurs héritiers remplissent la condition exigée par l’article précédent, il est procédé au partage des droits si l’étendue de ceux-ci le permet.

Si le partage n’est pas possible, et sauf accord amiable, les droits sont attribués par tirage au sort.

ARTICLE 106

Les cohéritiers non attributaires des droits visés aux deux articles précédents ne peuvent prétendre à une soulte que si les terrains sur lesquels ils s’exercent portent des cultures, plantations ou constructions bénéficiant à l’attributaire. Le montant de la soulte est déterminé d’après les barèmes établis pour fixer l’indemnité due au titulaire des droits lorsque l’Etat donne au sol une destination qui en exclut l’exercice.

ARTICLE 107

Les héritiers âgés de plus de seize (16) ans qui, sans être associés ni aux pertes ni aux bénéfices, et sans recevoir de salaire en contrepartie de leur collaboration, ont participé directement et effectivement à l’exploitation dune entreprise agricole, artisanale ou commerciale dépendant des biens de la succession, sont réputés légalement bénéficiaires d’un contrat de travail à salaire différé.

Les héritiers visés à l’alinéa précédent exercent leur droit de créance après le décès de l’exploitant et au cours du règlement de la succession, sauf si l’exploitant, de son vivant, a pourvu les bénéficiaires de leur droit de créance, notamment lors d’une donation-partage à laquelle il a procédée.

Pour chacune des années durant lesquelles l’héritier a participé à l’exploitation dans les conditions fixées à l’alinéa premier, le taux du salaire auquel il peut prétendre est égal au salaire minimum interprofessionnel garanti, prévu pour la branche professionnelle correspondante. Le salaire à appliquer dans chaque cas est celui en vigueur soit lors du règlement de la créance, si ce dernier intervient du vivant de l’exploitant, soit au moment de l’ouverture de la succession.

Si les héritiers sont mariés et que leurs conjoints participent également à l’exploitation dans les conditions fixées à l’alinéa premier, chacun des époux est réputé légalement bénéficiaire d’un contrat de travail à salaire différé dont le taux est égal aux trois huitièmes du salaire visé à l’alinéa précédent.

L’époux qui n’est pas le descendant de l’exploitant perd le bénéfice de ces dispositions en cas de divorce ou de séparation de corps prononcé à ses torts exclusifs.

Quelle que soit la durée de la collaboration apportée à l’exploitation, le droit de créance ne peut dépasser pour chacun des bénéficiaires, la somme représentant le montant de la rémunération due pour une période de dix (10) années, calculée sur les bases des alinéas trois et quatre ci-dessus.

SECTION 3 :

DU PAIEMENT DES DETTES

ARTICLE 108

Les cohéritiers contribuent entre eux au payement des dettes et charges de la succession, chacun dans la proportion de ce qu’il y prend.

ARTICLE 109

Les incapables ne sont jamais tenus des dettes qu’à concurrence de leur part.

ARTICLE 110

Le légataire à titre universel contribue avec les héritiers, au prorata de son émolument.

Le légataire particulier n’est pas tenu des dettes et charges, sauf toutefois l’action hypothécaire sur l’immeuble légué.

ARTICLE 111

Lorsque des immeubles d’une succession sont grevés de rentes par l’hypothèque spéciale, chacun des cohéritiers peut exiger que les rentes soient remboursées et les immeubles rendus libres avant qu’il soit procédé à la formation des lots.

Si les cohéritiers partagent la succession dans l’état où elle se trouve, l’immeuble grevé doit être estimé au même taux que les autres immeubles. Il est fait déduction du capital de la rente sur le prix total. L’héritier dans le lot duquel tombe cet immeuble, demeure seul chargé du service de la rente, et il doit en garantir ses cohéritiers.

ARTICLE 112

Les héritiers sont tenus des dettes et charges de la succession, personnellement pour leur part et portion virile, et hypothécairement pour le tout, sauf leur recours, soit contre leurs cohéritiers soit contre les légataires universels, à raison de la part pour laquelle ils doivent y contribuer.

ARTICLE 113

Le légataire particulier qui a acquitté la dette dont l’immeuble légué était grevé, demeure subrogé aux droits du créancier contre les héritiers et successeurs à titre universel.

ARTICLE 114

Le cohéritier ou successeur à titre universel, qui, par l’effet de l’hypothèque, a payé au-delà de sa part de la dette commune, n’a de recours contre les autres cohéritiers ou successeurs à titre universel, que pour la part que chacun d’eux doit personnellement en supporter.

Il en est de même lorsque le cohéritier qui a payé la dette se serait fait subroger aux droits des créanciers.
Toutefois, il ne peut être porté préjudice aux droits d’un cohéritier qui, par l’effet du bénéfice d’inventaire, aurait conservé la faculté de réclamer le payement de sa créance personnelle, comme tout autre créancier.

ARTICLE 115

En cas d’insolvabilité d’un des cohéritiers ou successeurs à titre universel, sa part dans la dette hypothécaire est répartie sur tous les autres, au marc le franc.

ARTICLE 116

Les titres exécutoires contre le défunt sont pareillement exécutoires contre l’héritier personnellement. Néanmoins les créanciers ne pourront en poursuivre l’exécution que  huit (8) jours après la signification de ces titres à la personne ou au domicile de l’héritier.

ARTICLE 117

Les créanciers peuvent demander, dans tous les cas, et contre tout autre créancier, la séparation du patrimoine du défunt d’avec le patrimoine de l’héritier.

ARTICLE 118

Le droit de demander la séparation des patrimoines ne peut plus être exercé lorsqu’il y a novation dans la créance contre le défunt, par l’acceptation de l’héritier pour débiteur.

Ce droit se prescrit, relativement aux meubles par le laps de trois (3) ans.

A l’égard des immeubles, l’action peut être exercée tant qu’ils existent dans la main de l’héritier.

ARTICLE 119

Les créanciers de l’héritier ne sont point admis à demander la séparation des patrimoines contre les créanciers de la succession.

Les créanciers d’un copartageant, pour éviter que le partage ne soit fait en fraude de leurs droits, peuvent s’opposer à ce qu’il y soit procédé hors de leur présence : ils ont le droit d’y intervenir à leurs frais ; mais ils ne peuvent attaquer un partage consommé, à moins toutefois qu’il n’y ait été procédé sans eux et au préjudice d’une opposition qu’ils auraient formée.

SECTION 4 :

DES EFFETS DU PARTAGE ET DE LA GARANTIE DES LOTS

ARTICLE 120

Chaque cohéritier est censé avoir succédé seul et immédiatement à tous les effets compris dans son lot, ou à lui échus sur licitation, et n’avoir jamais eu la propriété des autres effets de la succession.

ARTICLE 121

Les cohéritiers demeurent respectivement garants, les uns envers les autres, des troubles et évictions seulement qui procèdent d’une cause antérieure au partage.

Chacun des cohéritiers est personnellement obligé, en proportion de sa part héréditaire, d’indemniser son cohéritier de la perte que lui a causé l’éviction.

Si l’un des cohéritiers se trouve insolvable, la portion dont il est tenu doit être également répartie entre le garanti et tous les cohéritiers solvables.

La garantie de la solvabilité du débiteur d’une rente ne peut être exercée que dans les cinq ans qui suivent le partage. Il n’y a pas lieu à garantie à raison de l’insolvabilité du débiteur, quand elle n’est survenue que depuis le partage consommé.

ARTICLE 122

La garantie n’a pas lieu, si l’espèce d’éviction soufferte a été exceptée par une clause particulière et expresse de l’acte de partage. Elle cesse si c’est par sa faute que le cohéritier souffre l’éviction.

SECTION 5 :

DE LA RESCISION EN MATIERE DE PARTAGE

ARTICLE 123

Les partages peuvent être rescindés pour cause de violence ou de dol.

Il peut aussi y avoir lieu à rescision, lorsqu’un des cohéritiers établit, à son préjudice, une lésion de plus du quart. La simple omission d’un objet de la succession ne donne pas ouverture à l’action en rescision, mais seulement à un supplément à l’acte de partage.

ARTICLE 124

L’action en rescision est admise contre tout acte qui a pour objet de faire cesser l’indivision entre cohéritiers, encore qu’il fût qualifié de vente, d’échange et de transaction, ou de toute autre manière.

Toutefois, après le partage, ou l’acte qui en tient lieu, l’action en rescision n’est plus admissible contre la transaction faite sur les difficultés réelles que présentait le premier acte, même quand il n’y aurait pas eu à ce sujet de procès commencé.

ARTICLE 125

L’action n’est pas admise contre une vente de droits successifs faite sans fraude à l’un des cohéritiers, à ses risques et périls, par ses autres cohéritiers, ou par l’un d’eux.

ARTICLE 126

Pour juger s’il y a eu lésion, l’estimation des objets est faite selon leur valeur à l’époque du partage.

ARTICLE 127

Le défendeur à la demande en rescision peut en arrêter le cours et empêcher un nouveau partage, en offrant et en fournissant au demandeur le supplément de sa portion héréditaire, soit en numéraire, soit en nature.

ARTICLE 128

Le cohéritier qui a aliéné son lot en tout ou partie n’est plus recevable à intenter l’action en rescision pour dol ou violence, si l’aliénation qu’il a faite est postérieure à la découverte du dol, ou à la cessation de la violence.