CHAPITRE 5 : DE L’ACCEPTATION ET DE LA REPUDIATION DE LA SUCCESSION (2019)

SECTION 1 :

DES DISPOSITIONS GENERALES

ARTICLE 40

Toute personne peut accepter ou renoncer à une succession qui lui est échue.

 

ARTICLE 41

Lorsque celui à qui une succession est échue est décédé sans l’avoir répudiée ou sans l’avoir acceptée, expressément ou tacitement, son héritier peut l’accepter ou la répudier de son chef.

Si les héritiers ne sont pas d’accord pour accepter ou pour répudier la succession, elle est réputée acceptée sous bénéfice d’inventaire.

 

ARTICLE 42

La faculté d’accepter ou de répudier une succession se prescrit par cinq (5) ans à compter de l’ouverture de la succession.

L’héritier qui n’a pris parti dans ce délai, est réputé avoir accepté.

La prescription ne court pas tant que l’héritier a des motifs légitimes d’ignorer la naissance de son droit, notamment l’ouverture de la succession.

 

ARTICLE 43

Pendant le délai de prescription prévu à l’article 42, l’héritier ne peut être contraint à prendre qualité, et il ne peut être obtenu contre lui de condamnation. S’il renonce à la succession, les frais par lui exposés légitimement, sont à la charge de la succession.

 

ARTICLE 44

Après l’expiration des délais ci-dessus, l’héritier, en cas de poursuite dirigée contre lui, peut demander un nouveau délai, que le tribunal saisi de la contestation accorde ou refuse suivant les circonstances.

 

ARTICLE 45

Les frais de poursuite, dans le cas de l’article précédent, sont à la charge de la succession, si l’héritier justifie, ou qu’il n’avait pas eu connaissance du décès et que les délais ont été insuffisants, soit à raison de la situation des biens, soit à raison des contestations survenues : s’il n’en justifie pas, les frais restent à sa charge personnelle.

 

SECTION 2 :

DE L’ACCEPTATION DE LA SUCCESSION

ARTICLE 46

Une succession peut être acceptée purement et simplement, ou sous bénéfice d’inventaire.

 

ARTICLE 47

Nul n’est tenu d’accepter une succession qui lui est échue.

 

ARTICLE 48

L’effet de l’acceptation remonte au jour de l’ouverture de la succession.

 

ARTICLE 49

L’acceptation peut être expresse ou tacite. Elle est expresse quand on prend le titre ou la qualité d’héritier dans un acte authentique ou privé. Elle est tacite, quand le successible fait un acte qui suppose nécessairement son intention d’accepter, et qu’il n’aurait droit de faire qu’en sa qualité d’héritier.

 

ARTICLE 50

Les actes purement conservatoires ou de surveillance, et les actes d’administration provisoire, peuvent être accomplis par le successible sans emporter acceptation de la succession, si celui-ci n’y a pas pris la qualité ou le titre d’héritier.

Sont réputés purement conservatoires notamment :

1°) le paiement des frais funéraires et de dernières maladies du défunt, des impôts dus par le défunt, des loyers et autres dettes successorales dont le règlement est urgent ;

2°) le recouvrement des fruits et revenus des biens successoraux, à charge de justifier que les fonds ont été employés à éteindre les dettes visées au 1°) ou ont été déposés chez un notaire ou consignés ;

3°) L’acte destiné à éviter l’aggravation du passif successoral.

Sont réputés être des actes d’administration provisoire, les opérations courantes nécessaires à la continuation à court terme de l’activité de l’entreprise dépendant de la succession.

Sont également réputés pouvoir être accomplis sans emporter acceptation tacite de la succession, le renouvellement, en tant que bailleur ou preneur à bail, les baux qui, à défaut, donneraient lieu au paiement d’une indemnité, ainsi que la mise en œuvre des décisions d’administration ou de disposition engagées par le défunt et nécessaire au bon fonctionnement de l’entreprise.

Tout autre acte que requiert l’intérêt de la succession et que le successible veut accomplir sans prendre le titre ou la qualité d’héritier doit être autorisé par le juge.

S’il existe dans la succession des objets susceptibles de dépérir ou dispendieux à conserver, l’héritier peut, en sa qualité d’habile à succéder, et sans qu’on puisse en induire de sa part une acceptation, se faire autoriser par justice à procéder à la vente de ces effets.

Cette vente doit être faite par commissaire de Justice, après les affiches et publications réglées par les lois sur la procédure.

 

ARTICLE 51

La donation, vente ou transport que fait de ses droits successifs un des cohéritiers, soit à un tiers, soit à tous ses cohéritiers, soit à quelques-uns d’eux, emporte de sa part acceptation de la succession.

Il en est de même :

1°) de la renonciation, même gratuite, que fait un des héritiers au profit d’un ou de plusieurs de ses cohéritiers ;

2°) de la renonciation qu’il fait même au profit de tous ses cohéritiers indistinctement, lorsqu’il reçoit le prix de sa renonciation.

 

ARTICLE 52

Le majeur ne peut attaquer l’acceptation expresse ou tacite qu’il a faite d’une succession, que dans le cas où cette acceptation aurait été la suite d’un dol pratiqué envers lui.

Il ne peut rétracter son acceptation sous prétexte de lésion, excepté seulement dans le cas où la succession se trouverait absorbée ou diminuée de plus de moitié, par la découverte d’un testament inconnu au moment de l’acceptation.

 

SECTION 3 :

DE LA RENONCIATION AUX SUCCESSIONS

ARTICLE 53

La renonciation à une succession ne se présume pas. Elle est faite au greffe du tribunal du lieu où la succession est ouverte, sur un registre tenu à cet effet contre remise au déclarant d’une attestation de renonciation.

Le registre peut être consulté par toute personne intéressée.

 

ARTICLE 54

L’héritier qui renonce est censé n’avoir jamais été héritier.

 

ARTICLE 55

La part du renonçant accroît à ses cohéritiers. S’il est seul, elle est dévolue au degré subséquent.

 

ARTICLE 56

L’on ne vient pas par représentation d’un héritier qui a renoncé. Si le renonçant est seul héritier de son degré, ou si tous ses cohéritiers renoncent, les enfants viennent de leur chef et succèdent par tête.

ARTICLE 57

Les créanciers de celui qui renonce au préjudice de leurs droits, peuvent se faire autoriser en justice à accepter la succession du chef de leur débiteur, en ses lieu et place.

Dans ce cas, la renonciation n’est annulée qu’en faveur des créanciers, et jusqu’à concurrence seulement de leurs créances. Elle ne l’est pas au profit de l’héritier qui a renoncé.

 

ARTICLE 58

Tant que la prescription prévue à l’article 42 n’est pas acquise contre lui, l’héritier peut révoquer sa renonciation en acceptant la succession purement et simplement, si elle n’a pas été déjà acceptée par un autre héritier.

Cette acceptation rétroagit au jour de l’ouverture de la succession, sans toutefois remettre en cause les droits qui peuvent être acquis à des tiers sur les biens de la succession, soit par prescription, soit par actes valablement faits avec le curateur à la succession vacante.

 

ARTICLE 59

L’on ne peut renoncer à la succession d’un homme vivant, ni aliéner les droits éventuels qu’on peut avoir à cette succession.

 

ARTICLE 60

Les héritiers qui auraient diverti ou recelé des effets d’une succession, sont déchus de la faculté d’y renoncer. Ils demeurent héritiers purs et simples, nonobstant leur renonciation, sans pouvoir prétendre à aucune part dans les objets divertis ou recelés.

 

SECTION 4 :

DU BENEFICE D’INVENTAIRE, DE SES EFFETS
ET DES OBLIGATIONS DE L’HERITIER BENEFICIAIRE

ARTICLE 61

Un héritier peut déclarer qu’il n’accepte la succession que sous bénéfice d’inventaire.

La déclaration est faite au greffe du tribunal du lieu où la succession est ouverte. Elle est inscrite sur le même registre que celui destiné à recevoir les actes de renonciation.

ARTICLE 62

La déclaration est précédée ou suivie d’un inventaire fidèle et exact des biens de la succession.

 

ARTICLE 63

L’inventaire intervient dans le délai de six (6) mois à compter de la date de la déclaration au greffe.

L’inventaire est réalisé par une personne désignée comme il est dit à l’article 66.

 

ARTICLE 64

L’héritier qui s’est rendu coupable de recel, ou qui a omis, sciemment et de mauvaise foi, de comprendre dans l’inventaire des effets de la succession, est déchu du bénéfice d’inventaire.

Il demeure héritier pur et simple sans pouvoir prétendre à aucune part dans les objets divertis ou recelés.

 

ARTICLE 65

L’effet du bénéfice d’inventaire est de donner à l’héritier l’avantage :

1°) de n’être tenu du paiement des dettes de la succession que jusqu’à concurrence de la valeur des biens qu’il a recueillis, même de pouvoir se décharger du payement des dettes en abandonnant tous les biens de la succession aux créanciers et aux légataires ;

2°) de ne pas confondre ses biens personnels avec ceux de la succession, et de conserver contre elle le droit de réclamer le paiement de ses créances.

 

SECTION 5 :

DE L’ADMINISTRATION DE LA SUCCESSION

ARTICLE 66

Les héritiers peuvent choisir l’un ou plusieurs parmi eux, pour administrer la succession.

En cas de désaccord, un administrateur est désigné par le président du tribunal à la requête de toute partie intéressée.

L’administrateur désigné peut recourir à toute personne qualifiée.

 

ARTICLE 67

L’administrateur doit rendre compte de son administration aux héritiers, aux créanciers et aux légataires.

L’administrateur est tenu de répondre aux demandes et questions exprimées par un héritier, un créancier ou un légataire.

Il ne peut être contraint sur ses biens personnels qu’après avoir été mis en demeure de présenter son compte, et faute d’avoir satisfait à cette obligation.

Après l’apurement du compte, il ne peut être contraint sur ses biens personnels que jusqu’à concurrence des sommes dont il se trouve reliquataire.

 

ARTICLE 68

L’administrateur n’est tenu que des fautes graves dans l’administration dont il est chargé.

 

ARTICLE 69

L’administrateur ne peut vendre les meubles de la succession que par le ministère d’un commissaire de Justice, aux enchères, et après les affiches et publications accoutumées.

S’il les représente en nature, il n’est tenu que de la dépréciation ou de la détérioration causée par sa négligence.

 

ARTICLE 70

L’administrateur ne peut vendre les immeubles que dans les formes prescrites par la loi.

Il est tenu d’en déléguer le prix aux créanciers hypothécaires qui se sont fait connaître.

 

ARTICLE 71

L’administrateur est tenu, si les créanciers ou autres personnes intéressées l’exigent, de donner caution bonne et solvable de la valeur du mobilier compris dans l’inventaire, et de la portion du prix des immeubles non déléguée aux créanciers hypothécaires.

Faute par lui de fournir cette caution, les meubles sont vendus et leur prix est déposé, ainsi que la portion non déléguée du prix des immeubles, pour être employés à l’acquit des charges de la succession.

 

ARTICLE 72

S’il y a des créanciers opposants, l’administrateur ne peut payer que dans l’ordre et de la manière réglés par le juge.

S’il n’y a pas de créanciers opposants, il paye les créanciers et les légataires à mesure qu’ils se présentent.

 

ARTICLE 73

Les créanciers non opposants qui ne se présentent qu’après l’apurement du compte et le payement du reliquat, n’ont de recours à exercer que contre les légataires.

Dans l’un et l’autre cas, le recours se prescrit par le laps de trois (3) ans, à compter du jour de l’apurement du compte et du payement du reliquat.

 

ARTICLE 74

Les frais de scellés, s’il en a été apposé, d’inventaire et de compte, sont à la charge de la succession.

 

SECTION 6 :

DE L’ADMINISTRATION DE LA SUCCESSION VACANTE

ARTICLE 75

Lorsqu’après l’expiration du délai de cinq (5) ans à compter de l’ouverture de la succession, il ne se présente personne qui réclame une succession, qu’il n’y a pas d’héritiers connus, ou que les héritiers connus y ont renoncé, cette succession est réputée vacante.

 

ARTICLE 76

Le tribunal dans le ressort duquel la succession est ouverte, nomme un curateur sur la demande des personnes intéressées ou sur la réquisition du procureur de la République.

ARTICLE 77

Le curateur à une succession vacante est tenu, avant tout, d’en faire constater l’état par un inventaire et de rechercher les héritiers.

Il exerce, poursuit les droits et perçoit les deniers provenant du prix de vente des meubles ou immeubles. Il libère les legs aux légataires connus, et acquitte les dettes sur l’actif disponible suite aux demandes formulées contre la succession.

Il verse le numéraire restant de la succession dans la caisse du receveur des Domaines pour la conservation des droits, et à la charge de rendre compte à qui il appartiendra.

 

ARTICLE 78

Les dispositions des sections 4 et 5 du présent chapitre, sur les formes de l’inventaire, sur le mode d’administration et sur les comptes à rendre de la part de l’administrateur sont, au surplus, communes au curateur.

 

ARTICLE 79

La curatelle de la succession vacante prend fin :

1°) par l’affectation intégrale de l’actif au paiement des dettes et à la libération des legs ;

2°) par la réalisation de la totalité de l’actif et la consignation du produit net ;

3°) par la restitution de la succession aux héritiers dont les droits sont reconnus.

 

ARTICLE 80

Lorsque la curatelle a pris fin par la réalisation de la totalité de l’actif et la consignation du produit net, l’administration des Domaines doit demander l’envoi en possession au tribunal du lieu d’ouverture de la succession.

Le tribunal statue sur sa demande trois (3) mois après deux publications consécutives faites à dix (10) jours d’intervalle dans un journal d’annonces légales et affichage au bureau de la sous- préfecture ou de la mairie du lieu d’ouverture de la succession, le ministère public entendu.

L’administration des Domaines peut, avant de former sa demande, procéder par elle-même aux formalités de publicité prévues à l’alinéa précédent.

Dans tous les cas, il sera justifié de la publicité par la production des journaux d’annonces légales dans lesquels elle aura été faite et de l’affichage par un exemplaire du placard signé du directeur des Domaines et revêtu d’un certificat du sous-préfet ou du maire du lieu d’ouverture de la succession.

 

ARTICLE 81

Si l’administration des Domaines ne remplit pas les formalités prescrites, l’Etat peut être condamné aux dommages et intérêts envers les héritiers s’il s’en représente.