THERESE IZAY KIRONGOZI (CONGOLAISE)

Tout visiteur de passage à Kinshasa et à Lubumbashi est frappé par le spectacle des robots qui y règlent la circulation. Chaque androïde, bourré de composants électroniques, muni de caméras et équipé de panneaux solaires, mesure 2,50 m de hauteur et pèse 250 kg.

L’ingénieure Thérèse Izay Kirongozi, 42 ans, chef de projet du « robot roulage intelligent » et directrice de Women’s Technologies, est la « mère » de ces automates entièrement conçus et fabriqués à Kinshasa. L’ancienne association, qui s’est muée en société en 2012, emploie une dizaine de personnes à temps plein et plusieurs autres à temps partiel pour concevoir et fabriquer ces géants technologiques 100 % « made in Kin ».

Thérèse Izay est elle-même un pur produit de l’école congolaise. Elle a effectué toute sa scolarité à Kinshasa, sa ville natale, avant d’entamer, sans enthousiasme, des études à l’Institut supérieur de techniques appliquées (Ista). Rien ne la prédestinait à une carrière d’inventrice et de chef d’entreprise.

Ingénieure plutôt que mannequin

Adolescente, la jeune et déjà grande Kinoise (1,93 m) avait tapé dans l’œil d’une agence de recrutement de mannequins, qui, en 1993, alors qu’elle venait à peine de souffler ses 20 bougies, lui a fait miroiter l’espoir d’une existence douillette en Suisse, rythmée par des défilés de mode, des séances photo aux quatre coins de la planète, des contrats mirifiques, etc. Comme autant de promesses en l’air. « Mon père m’a inscrite à l’Ista alors que je voulais poursuivre mes études en Europe, dans un autre domaine. Je pensais, à tort, que l’électronique industrielle n’était pas faite pour moi. Pourtant, au fil des mois, j’y ai pris goût. » Elle sort de l’Ista en 1999, nantie d’un diplôme d’ingénieur technicien en électronique industrielle (automation-programmation).

Les autorités ont eu du mal à se faire à l’idée que ces automates, fabriqués ici grâce à une technologie 100 % congolaise, pouvaient répondre aux besoins d’une ville tentaculaire comme Kinshasa.

L’ingénieure ne regrette pas d’être passée à côté du strass et des paillettes. Elle est connue. Son travail est reconnu en Afrique comme en Europe, où elle est fréquemment invitée à des conférences. « J’ai mis mes propres fonds dans cette affaire, avec l’appui de mon mari. Au début, je ramais… Nous assurions nous-mêmes la maintenance des prototypes installés à Kinshasa, se souvient Thérèse Izay, le visage illuminé d’un large sourire. Les autorités ont eu du mal à se faire à l’idée que ces automates, fabriqués ici grâce à une technologie 100 % congolaise, pouvaient répondre aux besoins d’une ville tentaculaire comme Kinshasa. »

Les robots bientôt dans d’autres pays du continent

Après deux prototypes installés en 2013, trois robots « nouvelle génération » ont été livrés à la capitale en mars, et cinq aux autorités katangaises, dont trois à Lubumbashi. Le prix de vente d’une unité tourne autour de 25 000 dollars (environ 22 000 euros) et varie selon l’autonomie de ses panneaux solaires.

La société ne s’endort pas sur ses lauriers ; l’entreprise se développe et fait évoluer sa technologie. « Le robot envoie à la police, en temps réel, les images filmées par ses caméras. Nous avons recours à un faisceau hertzien, mais, à terme, nous allons basculer vers la fibre optique. La transmission des images se fera beaucoup plus vite », précise la chef de projet.

L’Angola, le Congo, la Côte d’Ivoire et le Nigeria sont intéressés. À quand la présence des premiers agents humanoïdes made in RD Congo dans ces pays.

Plusieurs autres villes congolaises veulent acquérir ces automates. Et Women’s Technologies entend également en exporter. L’Angola, le Congo, la Côte d’Ivoire et le Nigeria sont intéressés. À quand la présence des premiers agents humanoïdes made in RD Congo dans ces pays ? « Les pourparlers sont très avancés », se contente de répondre la chef d’entreprise.

Mariée et mère de trois enfants, Thérèse Izay ne regrette pas d’être restée au pays. Si son agenda de ministre ne lui laisse pas le temps de cuisiner, elle adore manger kinois. Pour elle, rien ne vaut un plat de haricots accompagnés de mpiodi (chinchard) et de fufu (pâte à base de manioc ou de maïs). Après une journée de travail, l’ingénieure aime aussi écouter de la musique « à fond », au volant de sa Range Rover. Des chansons funk, de vieux tubes congolais, dont les classiques de Papa Wemba, qui la font chavirer de bonheur… Presque autant que de voir sa fille cadette commencer une belle carrière de chanteuse.

SON INVENTION :

 

Source : www.jeuneafrique.com