TITRE XII : LES PRINCIPES DE LA ZONE

ARTICLE 136

PATRIMOINE COMMUN DE L’HUMANITE

La Zone et ses ressources sont le patrimoine commun de l’humanité.

 

ARTICLE 137

REGIME JURIDIQUE DE LA ZONE ET DE SES RESSOURCES

1. Aucun Etat ne peut revendiquer ou exercer de souveraineté ou de droits souverains sur une partie quelconque de la Zone ou de ses ressources; aucun Etat ni aucune personne physique ou morale ne peut s’approprier une partie quelconque de la Zone ou de ses ressources. Aucune revendication, aucun exercice de souveraineté ou de droits souverains ni aucun acte d’appropriation n’est reconnu.

2. L’humanité tout entière, pour le compte de laquelle agit l’Autorité, est investie de tous les droits sur les ressources de la Zone. Ces ressources sont inaliénables. Les minéraux extraits de la Zone ne peuvent, quant à eux, être aliénés que conformément à la présente partie et aux règles, règlements et procédures de l’Autorité.

3. Un Etat ou une personne physique ou morale ne revendique, n’acquiert ou n’exerce de droits sur les minéraux extraits de la Zone que conformément à la présente partie. Les droits autrement revendiqués, acquis ou exercés ne sont pas reconnus.

 

ARTICLE 138

CONDUITE GENERALE DES ETATS CONCERNANT LA ZONE

Dans leur conduite générale concernant la Zone, les Etats se conforment à la présente partie, aux principes énoncés dans la Charte des Nations Unies et aux autres règles du droit international, avec le souci de maintenir la paix et la sécurité et de promouvoir la coopération internationale et la compréhension mutuelle.

 

ARTICLE 139

OBLIGATION DE VEILLER AU RESPECT DE LA CONVENTION
ET RESPONSABILITE EN CAS DE DOMMAGES

1. Il incombe aux Etats Parties de veiller à ce que les activités menées dans la Zone, que ce soit par eux-mêmes, par leurs entreprises d’Etat ou par des personnes physiques ou morales possédant leur nationalité ou effectivement contrôlées par eux ou leurs ressortissants, le soient conformément à la présente partie. La même obligation incombe aux organisations internationales pour les activités menées dans la Zone par elles.

2. Sans préjudice des règles du droit international et de l’article 22 de l’annexe III, un Etat Partie ou une organisation internationale est responsable des dommages résultant d’un manquement de sa part aux obligations qui lui incombent en vertu de la présente partie; des Etats Parties ou organisations internationales agissant de concert assument conjointement et solidairement cette responsabilité. Toutefois, l’Etat Partie n’est pas responsable des dommages résultant d’un tel manquement de la part d’une personne patronnée par lui en vertu de l’article 153, paragraphe 2, lettre b), s’il a pris toutes les mesures nécessaires et appropriées pour assurer le respect effectif de la présente partie et des annexes qui s’y rapportent, comme le prévoient l’article 153, paragraphe 4, et l’article 4, paragraphe 4, de l’annexe III.

3. Les Etats Parties qui sont membres d’organisations internationales prennent les mesures appropriées pour assurer l’application du présent article en ce qui concerne ces organisations.

 

ARTICLE 140

INTÉRÊT DE L’HUMANITE

1. Les activités menées dans la Zone le sont, ainsi qu’il est prévu expressément dans la présente partie, dans l’intérêt de l’humanité tout entière, indépendamment de la situation géographique des Etats, qu’il s’agisse d’Etats côtiers ou sans littoral, et compte tenu particulièrement des intérêts et besoins des Etats en développement et des peuples qui n’ont pas accédé à la pleine indépendance ou à un autre régime d’autonomie reconnu par les Nations unies conformément à la résolution 1514 (XV) et aux autres résolutions pertinentes de l’Assemblée générale.

2. L’Autorité assure le partage équitable, sur une base non discriminatoire, des avantages financiers et autres avantages économiques tirés des activités menées dans la Zone par un mécanisme approprié conformément à l’article 160, paragraphe 2, lettre f), i).

 

ARTICLE 141

UTILISATION DE LA ZONE A DES FINS EXCLUSIVEMENT PACIFIQUES

La Zone est ouverte à l’utilisation à des fins exclusivement pacifiques par tous les Etats, qu’il s’agisse d’Etats côtiers ou sans littoral, sans discrimination et sans préjudice des autres dispositions de la présente partie.

 

ARTICLE 142

DROITS ET INTÉRÊTS LEGITIMES DES ETATS COTIERS

1. Dans le cas de gisements de ressources de la Zone qui s’étendent au-delà des limites de celle-ci, les activités menées dans la Zone le sont compte dûment tenu des droits et intérêts légitimes de l’Etat côtier sous la juridiction duquel s’étendent ces gisements.

2. Un système de consultations avec l’Etat concerné, et notamment de notification préalable, est établi afin d’éviter toute atteinte à ces droits et intérêts. Dans les cas où des activités menées dans la Zone peuvent entraîner l’exploitation de ressources se trouvant en deçà des limites de la juridiction nationale d’un Etat côtier, le consentement préalable de cet Etat est nécessaire.

3. Ni la présente partie ni les droits accordés ou exercés en vertu de celle-ci ne portent atteinte au droit qu’ont les Etats côtiers de prendre les mesures compatibles avec les dispositions pertinentes de la partie XII qui peuvent être nécessaires pour prévenir, atténuer ou éliminer un danger grave et imminent pour leur littoral ou pour des intérêts connexes, imputable à une pollution ou à une menace de pollution résultant de toutes activités menées dans la Zone ou à tous autres accidents causés par de telles activités.

 

ARTICLE 143

RECHERCHE SCIENTIFIQUE MARINE

1. La recherche scientifique marine dans la Zone est conduite à des fins exclusivement pacifiques et dans l’intérêt de l’humanité tout entière, conformément à la partie XIII.

2. L’Autorité peut effectuer des recherches scientifiques marines sur la Zone et ses ressources et peut passer des contrats à cette fin. Elle favorise et encourage la recherche scientifique marine dans la Zone, et elle coordonne et diffuse les résultats de ces recherches et analyses, lorsqu’ils sont disponibles.

3. Les Etats Parties peuvent effectuer des recherches scientifiques marines dans la Zone. Ils favorisent la coopération internationale en matière de recherches scientifiques marines dans la Zone :

a) en participant à des programmes internationaux et en encourageant la coopération en matière de recherches scientifiques marines effectuées par le personnel de différents pays et celui de l’Autorité;

b) en veillant à ce que des programmes soient élaborés par l’intermédiaire de l’Autorité ou d’autres organisations internationales, le cas échéant, au bénéfice des Etats en développement et des Etats technologiquement moins avancés en vue de :

i) renforcer leur potentiel de recherche;

ii) former leur personnel et celui de l’Autorité aux techniques et aux applications de la recherche;

iii) favoriser l’emploi de leur personnel qualifié pour les recherches menées dans la Zone;

c) en diffusant effectivement les résultats des recherches et analyses, lorsqu’ils sont disponibles, par l’intermédiaire de l’Autorité ou par d’autres mécanismes internationaux, s’il y a lieu.

 

ARTICLE 144

TRANSFERT DES TECHNIQUES

1. Conformément à la Convention, l’Autorité prend des mesures :

a) pour acquérir les techniques et les connaissances scientifiques relatives aux activités menées dans la Zone; et

b) pour favoriser et encourager le transfert aux Etats en développement de ces techniques et connaissances scientifiques, de façon que tous les Etats Parties puissent en bénéficier.

2. A cette fin, l’Autorité et les Etats Parties coopèrent pour promouvoir le transfert des techniques et des connaissances scientifiques relatives aux activités menées dans la Zone, de façon que l’Entreprise et tous les Etats parties puissent en bénéficier. En particulier, ils prennent ou encouragent l’initiative :

a) de programmes pour le transfert à l’Entreprise et aux Etats en développement de techniques relatives aux activités menées dans la Zone, prévoyant notamment, pour l’Entreprise et les Etats en développement, des facilités d’accès aux techniques pertinentes selon des modalités et à des conditions justes et raisonnables;

b) de mesures visant à assurer le progrès des techniques de l’Entreprise et des techniques autochtones des Etats en développement, et particulièrement à permettre au personnel de l’Entreprise et de ces Etats de recevoir une formation aux sciences et techniques marines, ainsi que de participer pleinement aux activités menées dans la Zone.

 

ARTICLE 145

PROTECTION DU MILIEU MARIN

En ce qui concerne les activités menées dans la Zone, les mesures nécessaires doivent être prises conformément à la Convention pour protéger efficacement le milieu marin des effets nocifs que pourraient avoir ces activités. L’Autorité adopte à cette fin des règles, règlements et procédures appropriés visant notamment à :

a) prévenir, réduire et maîtriser la pollution du milieu marin, y compris le littoral, et faire face aux autres risques qui le menancent, ainsi qu’à toute perturbation de l’équilibre écologique du milieu marin, en accordant une attention particulière à la nécessité de protéger celui-ci des effets nocifs d’activités telles que forages, dragages, excavations, élimination de déchets, construction et exploitation ou entretien d’installations, de pipelines et d’autres engins utilisés pour ces activités;

b) protéger et conserver les ressources naturelles de la Zone et prévenir les dommages à la flore et à la faune marines.

 

ARTICLE 146

PROTECTION DE LA VIE HUMAINE

En ce qui concerne les activités menées dans la Zone, les mesures nécessaires doivent être prises en vue d’assurer une protection efficace de la vie humaine. L’Autorité adopte à cette fin des règles, règlements et procédures appropriés pour compléter le droit international existant tel qu’il est contenu dans les traités en la matière.

 

ARTICLE 147

COMPATIBILITE DES ACTIVITES MENEES DANS LA ZONE
ET DES AUTRES ACTIVITES S’EXERÇANT DANS LE MILIEU MARIN

1. Les activités menées dans la Zone le sont en tenant raisonnablement compte des autres activités s’exerçant dans le milieu marin.

2. Les conditions ci-après s’appliquent aux installations utilisées pour des activités menées dans la Zone :

a) ces installations ne doivent être montées, mises en place et enlevées que conformément à la présente partie et dans les conditions fixées par les règles, règlements et procédures de l’Autorité. Leur montage, leur mise en place et leur enlèvement doivent être dûment notifiés et l’entretien de moyens permanents pour signaler leur présence doit être assuré;

b) ces installations ne doivent pas être mises en place là où elles risquent d’entraver l’utilisation de voies de circulation reconnues essentielles pour la navigation internationale, ni dans des zones où se pratique une pêche intensive;

c) ces installations doivent être entourées de zones de sécurité convenablement balisées de façon à assurer la sécurité des installations elles-mêmes et celle de la navigation. La configuration et l’emplacement de ces zones de sécurité sont déterminés de telle sorte qu’elles ne forment pas un cordon empêchant l’accès licite des navires à certaines zones marines ou la navigation dans des voies servant à la navigation internationale;

d) ces installations sont utilisées à des fins exclusivement pacifiques;

e) ces installations n’ont pas le statut d’îles. Elles n’ont pas de mer territoriale qui leur soit propre et leur présence n’a pas d’incidence sur la délimitation de la mer territoriale, de la zone économique exclusive ou du plateau continental.

3. Les autres activités s’exerçant dans le milieu marin sont menées en tenant raisonnablement compte des activités menées dans la Zone.

 

ARTICLE 148

PARTICIPATION DES ETATS EN DEVELOPPEMENT
AUX ACTIVITES MENEES DANS LA ZONE

La participation effective des Etats en développement aux activités menées dans la Zone est encouragée, comme le prévoit expressément la présente partie, compte dûment tenu des intérêts et besoins particuliers de ces Etats, et notamment du besoin particulier qu’ont ceux d’entre eux qui sont sans littoral ou géographiquement désavantagés de surmonter les obstacles qui résultent de leur situation défavorable, notamment de leur éloignement de la Zone et de leurs difficultés d’accès à la Zone et depuis celle-ci.

 

ARTICLE 149

OBJETS ARCHEOLOGIQUES ET HISTORIQUES

Tous les objets de caractère archéologique ou historique trouvés dans la Zone sont conservés ou cédés dans l’intérêt de l’humanité tout entière, compte tenu en particulier des droits préférentiels de l’Etat ou du pays d’origine, ou de l’Etat d’origine culturelle, ou encore de l’Etat d’origine historique ou archéologique.