ARRÊT DU 08 JUIN 1995 DE LA COUR SUPRÊME, CHAMBRE JUDICIAIRE

Licenciement – Licenciement pour motif économique – Utilisation de personnel temporaire –
Embauchage au sens de l’article 13 al6 de la Convention Collective interprofessionnelle

Ne constitue pas un embauchage au sens de l’article 13 al6 de la Convention collective, le fait pour un employeur d’utiliser après le licenciement pour motif économique, un personnel fourni par une société pour un travail temporaire.

En décidant autrement, la Cour d’appel a violé les articles 38 in fine et 13 al6 de la Convention Collective. Par conséquent sa décision encourt la cassation.

La Cour,

Vu les mémoires produits ;

SUR LE DEUXIEME MOYEN DE CASSATION

Vu les articles 38 in fine et 13 alinéa 6 de la Convention Collective Interprofessionnelle ;

Attendu qu’aux termes du premier texte, « lorsque le licenciement collectif est opéré dans la forme prévue par la présente convention, les travailleurs licenciés bénéficieront d’une priorité de réembauchage dans les conditions prévues au 6ème alinéa de l’article 13 de la présente convention » ;

Que ce dernier texte prévoit que « le travailleur congédié par suite de suppression d’emploi ou de compression de personnel, conserve pendant deux ans, la priorité d’embauche dans la même catégorie d’emploi ;

Attendu qu’il résulte des énonciations de l’arrêt attaqué, Abidjan, Chambre Sociale 28 Avril 1994, que suite à la baisse de ses activités, la Société S., procédait le 16 Novembre 1991, au licenciement collectif de 31 employés conformément à la législation en vigueur ;

Que le 18 Décembre 1991, la mise en casier des bouteilles d’un nouveau produit contenues dans les silos n’étant pas encore entamée, elle sollicitait le concours de la Société S. P. et, en accord avec les délégués du personnel, engageait quelques manœuvres qu’elle payait ; que de même quatre travailleurs licenciés, acceptaient des postes de remplacement à l’usine de Yopougon ;

Qu’alors le sieur K. et autres, employés licenciés citaient la société S. devant le Tribunal du Travail en paiement de reliquats de droit et de dommages-intérêts pour violation des articles 38 et 13 de la Convention Collective Interprofessionnelle ; que cette juridiction faisait droit à leur premier chef de demande mais les déboutait du second ;

Que par contre la Cour d’Appel condamnait la Société S. à payer à titre de dommages-intérêts à K. et consorts 800.000 Francs chacun ; à certains 600.000 Francs ; et à deux autres 400.000 Francs chacun ; soit la somme totale de 19.000.000 francs et confirmait les autres dispositions du jugement ;

Attendu qu’il est fait grief aux Juges d’Appel d’avoir erré dans l’application ou l’interprétation des articles 38 in fine et 13 alinéa 6 de la Convention Collective Interprofessionnelle en déclarant que la société S. a embauché des travailleurs auprès de la Société S. P., alors qu’il résulte du bon de commande du 18 Décembre 1991 et de la facture du 31 Décembre 1991 que pour le personnel fourni pendant 10 jours, la société S. a payé à cette Société, la somme totale de 315.000 Francs ;

Attendu en effet qu’il est constant qu’après le licenciement collectif régulièrement opéré par la société S. pour motif économique, elle a utilisé un personnel fourni par la Société S. P. pour un travail temporaire ;

Que dès lors, il ne s’agit pas d’embauche au sens de l’article 13 alinéa 6 ci-dessus qui implique le remplacement définitif du travailleur congédié dans l’emploi qu’il occupait ; qu’en décidant autrement la Cour d’Appel a violé les textes visés au moyen ;

LE PRESIDENT