CHAPITRE 3 : ENTRAIDE JUDICIAIRE (2005)

ARTICLE 53

MODALITES DE L’ENTRAIDE JUDICIAIRE

A la requête d’un Etat membre de I’UEMOA, les demandes l’entraide se rapportant aux infractions prévues aux articles 37 à 40 sont exécutées, conformément aux principes définis par les articles 54 à 70.

Les dispositions de l’alinéa précédent sont applicables aux demandes émanant d’un Etat tiers, lorsque la législation de cet Etat fait obligation à celui-ci de donner suite aux demandes de même nature émanant de l’autorité compétente.

L’entraide peut, notamment inclure :

  • le recueil de témoignages ou de dépositions ;
  • la fourniture d’une aide pour la mise à disposition des autorités judiciaires de l’Etat requérant de personnes détenues ou d’autres personnes, aux fins de témoignage ou d’aide dans la conduite de l’enquête ;
  • la remise de documents judiciaires ;
  • les perquisitions et les saisies ;
  • l’examen d’objets et de lieux ;
  • la fourniture de renseignements et de pièces à conviction ;
  • la fourniture des originaux ou de copies certifiées conformes de dossiers et documents pertinents, y compris de relevés bancaires de pièces comptables de registres montrant le fonctionnement d’une entreprise ou ses activités commerciales.

ARTICLE 54

CONTENU DE LA DEMANDE D’ENTRAIDE JUDICIAIRE

Toute demande, d’entraide judiciaire adressée à l’autorité compétente est faite par écrit.

Elle comporte :

a) le nom de l’autorité qui sollicite la mesure ;

b) le nom de l’autorise compétente et de l’autorité chargée de l’enquête ou de la procédure auxquelles se rapporte la demande ;

c) l’indication de la mesure sollicitée ;

d) un exposé des faits constitutifs de l’infraction et des dispositions législatives applicables, sauf si la demande a pour seul objet la remise d’actes de procédure ou de décisions judiciaires ;

e) tous éléments connus permettant l’identification de la ou des personnes concernées et, notamment l’état civil la nationalité, l’adresse et la profession ;

f) tous renseignements nécessaires pour localiser les instruments, ressources ou biens visés ;

g) un exposé détaillé de toute procédure ou demande particulière que l’Etat requérant souhaite voir suivre ou exécuter ;

h) l’indication du délai dans lequel l’Etat requérant souhaiterait voir exécuter la demande ;

i) toute autre information nécessaire pour la bonne exécution de la demande.

ARTICLE 55

DES REFUS D’EXECUTION DE LA DEMANDE D’ENTRAIDE

La demande d’entraide judiciaire ne peut être refusée que ;

  • si elle n’émane pas d’une autorité compétente selon la législation du pays requérant ou si elle n’a pas été transmise régulièrement ;
  • si son exécution risque de porter atteinte à l’ordre public, à la souveraineté à la sécurité ou aux principes fondamentaux du droit ;
  • si les faits sur lesquels elle porte font l’objet de poursuites pénales ou ont déjà fait l’objet d’une décision de justice définitive sur le territoire national ;
  • si des mesures sollicitées ou toutes autres mesures ayant des effets analogues, ne sont pas autorisées ou ne sont pas applicables à l’infraction visée dans la demande, en vertu de la législation en vigueur ;
  • si les mesures demandées ne peuvent être prononcées ou exécutées pour cause de prescription de l’infraction de blanchiment en vertu de la législation en vigueur ou de la loi de l’Etat requérant ;
  • si la décision dont l’exécution est demandée n’est pas exécutoire selon la législation en vigueur ;
  • si la décision étrangère a été prononcée dans des conditions n’offrant pas de garanties suffisantes au regard des droits de la défense ;
  • s’il y a de sérieuses raisons de penser que les mesures demandées ou la décision sollicitée ne visent la personne concernée qu’en raison de sa race, de sa religion de sa nationalité de son origine ethnique, de ses opinions politiques, de son sexe ou de son statut.

Le secret professionnel ne peut être invoqué pour refuser d’exécuter la demande.

Le ministère public peut interjeter appel de la décision de refus d’exécution rendue par une juridiction dans les quinze (15) jours qui suivent cette décision.

Le Gouvernement de la République de Côte d’Ivoire communique sans délai à l’Etat requérant les motifs du refus d’exécution de sa demande.

ARTICLE 56

SECRET SUR LA DEMANDE D’ENTRAIDE JUDICIAIRE

L’autorité compétente maintient le secret sur la demande d’entraide judiciaire. Sur sa teneur et les pièces produites, ainsi que le fait même de l’entraide.

S’il n’est pas possible d’exécuter ladite demande sans divulguer le secret, l’autorité compétente en informe l’Etat requérant, qui décidera, dans ce cas, s’il maintient la demande.

ARTICLE 57

DEMANDE DE MESURES D’ENQUÊTE ET D’INSTRUCTION

Les mesures d’enquête et d’instruction sont exécutées conformément à la législation en vigueur, à moins que l’autorité compétente de l’Etat requérant n’ait demandé qu’il soit procédé selon une forme particulière compatible avec cette législation.

Un magistrat ou un fonctionnaire délégué par l’autorité compétente de l’Etat requérant peut assister à l’exécution des mesures selon qu’elles sont effectuées par un magistrat ou par un fonctionnaire.

S’il y a lieu, les autorités judiciaires ou policières de la République de Côte d’Ivoire peuvent accomplir, en collaboration avec les autorités d’autres Etats membres de l’Union, des actes d’enquête ou d’instruction.

 

ARTICLE 58

REMISE D’ACTES DE PROCEDURE ET DE DECISIONS JUDICIAIRES

Lorsque la demande d’entraide a pour objet la remise d’actes de procédure et/ou de décisions judiciaires, elle devra comprendre, outre les indications prévues à l’article 54, le descriptif des actes ou décisions visés.

L’autorité compétente procède à la remise des actes de procédure et de décisions judiciaires qui lui seront envoyés à cette fin par l’Etat requérant.

Cette remise peut être effectuée par simple transmission de l’acte ou de la décision au destinataire. Si l’autorité compétente de l’Etat requérant en fait expressément la demande, la remise est effectuée dans une des formes prévues par la législation en vigueur pour les significations analogues ou dans une forme spéciale compatible avec cette législation.

La preuve de la remise se fait au moyen d’un récépissé daté et signé par le destinataire ou d’une déclaration de l’autorité compétente constatant le fait, la forme et la date de la remise. Le document établi pour constituer la preuve de la remise est immédiatement transmis à l’Etat requérant.

Si la remise n’a pu se faire, l’autorité compétente en fait connaître immédiatement le motif à l’Etat requérant.

La demande de remise d’un document requérant la comparution d’une personne doit être effectuée au plus tard soixante jours avant la date de comparution.

 

ARTICLE 59

LA COMPARUTION DES TEMOINS NON DETENUS

Si, ans une poursuite exercée du chef des infractions visées dans la présente loi, la comparution personnelle d’un témoin résidant sur le territoire national est jugée nécessaire par les autorités judiciaires d’un Etat étranger, l’autorité compétente, saisie d’une demande transmise par la voie diplomatique, l’engage à se rendre à l’invitation qui lui est adressée.

La demande tendant à obtenir la comparution du témoin comporte, outre les indications prévues par l’article 54, les éléments d’identification du témoin.

Néanmoins, la demande n’est reçue et transmise qu’à la double condition que le témoin ne sera ni poursuivi ni détenu pour des faits ou des condamnations, antérieures à sa comparution et qu’il ne sera pas obligé, sans son consentement, de témoigner dans une procédure ou de prêter son concours à une enquête sans rapport avec la demande d’entraide.

Aucune sanction, ni mesure de contrainte ne peuvent être appliquées au témoin qui refuse de déférer à une demande tendant à obtenir sa comparution.

 

ARTICLE 60

LA COMPARUTION DE PERSONNES DETENUES

Si, dans une poursuite exercée du chef de l’une des infractions visées dans la présente loi, la comparution personnelle d’un témoin détenu sur le territoire national est jugée nécessaire, l’autorité compétente, saisie d’une demande adressée directement au parquet compétent, procédera au transfert de l’intéressé.

Néanmoins, il ne sera donné suite à la demande que si l’autorité compétente de l’Etat requérant s’engage à maintenir en détention la personne transférée aussi longtemps que la peine qui lui a été infligée par les juridictions nationales compétentes ne sera pas entièrement purgée et à le renvoyer en état de détention à l’issue de la procédure ou plus tôt si sa présence cesse d’être nécessaire.

 

ARTICLE 61

CASIER JUDICIAIRE

Lorsque des poursuites sont exercées par une juridiction d’un Etat membre de l’UEMOA du chef de l’une des infractions visées par la présente loi, le parquet de ladite juridiction peut obtenir directement des autorités compétentes nationales un extrait de casier judiciaire et tous renseignements relatifs à la personne poursuivie.

Les dispositions de l’alinéa précédent sont applicables lorsque les poursuites sont exercées par une juridiction d’un Etat tiers et que cet Etat réserve le même traitement aux demandes de même nature émanent des juridictions nationales compétentes.

 

ARTICLE 62

DEMANDE DE PERQUISITION ET DE SAISIE

Lorsque la demande d’entraide a pour objet l’exécution de mesures de perquisitions, et de saisie pour recueillir des pièces à conviction, l’autorité compétente y donne droit, dans une mesure compatible avec la législation en vigueur et à condition que les mesures sollicitées ne portent pas atteinte aux droits de tiers de bonne foi.

 

ARTICLE 63

DEMANDE DE CONFISCATION

Lorsque la demande d’entraide judiciaire a pour objet une décision ordonnant une confiscation, la juridiction compétente statue sur saisine de l’autorité compétente de l’Etat requérant.

La décision de confiscation doit viser un bien, constituant le produit ou l’instrument de l’une des infractions visée par la présente loi, et se trouvant sur le territoire national ou consister en l’obligation de payer une somme d’argent correspondant à la valeur de ce bien.

Il ne peut être donné suite à une demande tendant à obtenir une décision de confiscation si une telle décision a pour effet de porter atteinte aux droits légalement constitués au profit des tiers sur les biens visés en application de la loi.

 

ARTICLE 64

DEMANDE DE MESURES CONSERVATOIRES
AUX FINS DE PREPARER UNE CONFISCATION

Lorsque la demande d’entraide a pour objet de rechercher le produit des infractions visées dans la présente loi qui se trouve sur le territoire national, l’autorité compétente peut effectuer des investigations dont les résultats seront communiqués à l’autorité compétente de l’Etat requérant.

A cet effet, l’autorité compétente prend toutes les dispositions nécessaires pour remonter à la source des avoirs, enquêter sur les opérations financières appropriées et recueillir tous autres renseignements ou témoignages de nature à faciliter le placement sous main de justice des produits de l’infraction.

Lorsque les investigations prévues à l’alinéa premier du présent article aboutissant à des résultats positifs, l’autorité compétente prend, sur demande de l’autorité compétente de l’Etat requérant, toute mesure propre à prévenir la négociation, la cession ou l’aliénation des produits visés en attendant une décision définitive de la juridiction compétente de l’Etat requérant.

Toute demande à obtenir les mesures visées dans le présent article doit énoncer, outre les indications prévues à l’article 54, les raisons qui portent l’autorité compétente de l’Etat requérant à croire que les produits ou les instruments des infractions se trouvent sur son territoire, ainsi que les renseignements permettant de les localiser.

 

ARTICLE 65

EFFET DE LA DECISION DE CONFISCATION PRONONCEE A L’ETRANGER

Dans la mesure compatible avec la législation en vigueur, l’autorité compétente donne effet à toute décision de justice définitive de saisie ou de confiscation des produits des infractions visées dans la présente loi émanant d’une juridiction d’un Etat membre de l’UEMOA.

Les dispositions de l’alinéa précédent s’appliquent aux décisions émanant des juridictions d’un Etat tiers, lorsque cet Etat réserve le même traitement aux décisions émanant des juridictions nationales compétentes.

Nonobstant les dispositions des deux alinéas précédents, l’exécution des décisions émanant de l’étranger ne peut avoir pour effet de porter atteinte aux droits légalement constitués sur les biens visés au profit des tiers, en application de la loi.

Cette règle ne fait pas obstacle à l’application des dispositions des décisions étrangères relatives aux droits des tiers, sauf si ceux-ci n’ont pas été mis à même de faire valoir leurs droits devant la juridiction compétente de l’Etat étranger dans des conditions analogues à celles prévues par la loi en vigueur.

 

ARTICLE 66

SORT DES BIENS CONFISQUES

L’Etat jouit du pouvoir de disposition sur les biens confisqués sur son territoire à la demande d’autorités étrangères, à moins qu’un accord conclu avec le Gouvernement requérant n’en décide autrement.

 

ARTICLE 67

DEMANDE D’EXECUTION DES DECISIONS RENDUES A L’ETRANGER

Les condamnations à des peines privatives de liberté, à des amendes et confiscations, ainsi qu’à des déchéances prononcées pour les infractions visées par la présente loi, par une décision définitive émanant d’une juridiction d’un Etat membre de l’UEMOA, peuvent être exécutées sur le territoire national, à la demande des autorités compétentes de cet Etat.

Les dispositions de l’alinéa précédent s’appliquent aux condamnations prononcées par les juridictions d’un Etat tiers, lorsque cet Etat réserve le même traitement aux condamnations prononcées par les juridictions nationales.

 

ARTICLE 68

MODALITE D’EXECUTION

Les décisions de condamnation prononcées à l’étranger sont exécutées conformément à la législation en vigueur.

 

ARTICLE 68

ARRÊT DE L’EXECUTION

Il est mis fin à l’exécution lorsqu’en raison d’une décision ou d’un acte de procédure émanant de l’Etat qui a prononcé la sanction, celle-ci perd son caractère exécutoire.

 

ARTICLE 70

REFUS D’EXECUTION

La demande d’exécution de la condamnation prononcée à l’étranger est rejetée si la peine est prescrite au regard de la loi de l’Etat requérant.