DECRET N° 96-194 DU 7 MARS 1996 RELATIF AU TRAVAIL TEMPORAIRE

ARTICLE PREMIER

Est entrepreneur de travail temporaire toute personne physique ou morale dont l’activité exclusive est de mettre à la disposition provisoire d’utilisateurs, personnes physiques ou morales, des salariés qu’en fonction d’une qualification convenue, elle embauche et rémunère à cet effet.

 

ARTICLE 2

La période pendant laquelle le travailleur temporaire est à la disposition de l’utilisateur est appelée mission.

La durée d’une mission ne peut être supérieure à trois (3) mois elle est renouvelable, par des périodes d’un (1) mois au maximum.

Un accord conclu entre l’entrepreneur de travail temporaire et l’utilisateur détermine les conditions d’exécution de la mission.

 

ARTICLE 3

Lorsque la durée de la mission du même travailleur excède la durée maximum prévue au précédent article, l’entrepreneur sera censé avoir fait le placement du travailleur concerné dans l’entreprise de l’utilisateur pour une durée indéterminée.

Dans ce cas le travailleur est réputé embauché par l’utilisateur, à compter de la date à laquelle la mission a commencé.

 

CONDITIONS D’EXERCICE DE LA PROFESSION
D’ENTREPRENEUR DE TRAVAIL TEMPORAIRE

ARTICLE 4

Toute personne physique qui souhaite exercer la profession d’entrepreneur de travail temporaire doit:

  • être majeur et jouir de ses droits civils ;
  • être de nationalité ivoirienne ou représentant d’une personne morale de droit ivoirien ;
  • n’avoir pas été condamné à une peine d’emprisonnement ferme pour délit contre l’honneur ou la probité ;
  • ne pas exercer de fonction rémunérée dans une Administration ou un Etablissement public.

Elle doit adresser au ministre chargé du Travail :

  • une demande d’autorisation d’exercice de la profession d’entrepreneur de travail temporaire ;
  • un extrait d’état civil ;
  • un extrait de casier judiciaire datant de moins de trois (3) mois ;
  • une attestation de l’Administration fiscale.

 

ARTICLE 5

Toute personne morale qui souhaite exercer l’activité d’entrepreneur de travail temporaire doit adresser au ministre chargé du Travail, une demande à laquelle seront joints :

  • les statuts de la société ;
  • un certificat de position fiscale.

Outre son casier judiciaire datant de moins de trois (3) mois, le représentant légal de la société doit remplir toutes les conditions prévues à l’article 4, alinéa premier ci-dessus.

 

ARTICLE 6

Toute personne physique ou morale appartenant à un Etat accordant la réciprocité à la République de Côte d’Ivoire peut, si elle remplit les autres conditions prévues aux articles 4 ou 5 ci-dessus, être autorisée à exercer l’activité d’entrepreneur de travail temporaire.

 

ARTICLE 7

Toute autorisation est accordée ou refusée dans les jours suivant la date de dépôt de la demande. Passé ce délai, sans réponse du ministre, l’autorisation est acquise.

Elle est accordée pour une période d’un (1) an renouvelable, compte tenu de critères préalablement déterminés par l’autorité compétente.

 

ARTICLE 8

Après l’obtention de l’autorisation toute personne physique ou morale concernée doit s’inscrire au registre du commerce préalablement à l’exercice de l’activité.

 

ARTICLE 9

Toute autorisation obtenue d’une manière frauduleuse ou sur la base de renseignements inexacts, fera l’objet d’un retrait sans préjudice de poursuites pénales.

Le retrait de l’autorisation est notifié par écrit. Il produit effet à l’égard des tiers, trente jours après la date de la notification.

 

ARTICLE 10

Tout contrat établi entre l’entrepreneur de travail temporaire et l’utilisateur ou le travailleur, avant que l’entrepreneur soit en possession de l’autorisation prescrite, est nul et de nul effet.

En l’absence d’autorisation, tout utilisateur devra assurer le paiement du salaire et des accessoires du salaire dus au travailleur pour la durée de la mission.

 

ARTICLE 11

L’entrepreneur de travail temporaire qui fait exécuter par les travailleurs des missions de durée généralement supérieure à celle prévue à l’article 2, alinéa 2, peut être frappé du retrait provisoire de l’autorisation pendant une durée qui ne peut excéder un (1) mois. Passé ce délai, il pourra être procédé au retrait définitif de l’autorisation.

 

RELATIONS ENTRE L’ENTREPRENEUR DE TRAVAIL
TEMPORAIRE ET LE TRAVAILLEUR TEMPORAIRE

ARTICLE 12

Tout candidat à un emploi de travailleur temporaire doit fournir, lors de son embauche par l’entrepreneur, un dossier comprenant :

  • le diplôme justifiant son niveau de formation générale ou sa qualification professionnelle ;
  • le cas échéant, un certificat de travail de son précédent employeur ;
  • pour certains emplois n’exigeant qu’une initiation de courte durée, ni le diplôme, ni le niveau de formation générale ne sera exigé ;
  • dans certains cas, une déclaration sur l’honneur sera demandée pour spécifier que le candidat n’a pas subi de condamnation à une peine d’emprisonnement ferme ou qu’il ne fait pas l’objet de poursuite ou d’information pénale.

 

ARTICLE 13

Toute déclaration inexacte du travailleur lors de son embauche entraîne la rupture de son contrat et le cas échéant, la réparation du préjudice causé à l’entrepreneur.

 

ARTICLE 14

Le contrat qui lie l’entrepreneur de travail temporaire à chacun de ses travailleurs doit être formulé par écrit et comporter les énonciations suivantes :

  • la raison sociale et l’adresse complète de l’entreprise et de l’entrepreneur ;
  • l’indication de l’autorisation d’exercer la profession d’entrepreneur de travail temporaire avec précision de la date d’obtention ;
  • les nom, prénoms, date, lieu de naissance, le domicile et l’adresse du travailleur ;
  • la nature de l’activité, à exercer par le travailleur ;
  • le début et la durée du contrat ;
  • le cas échéant, le délai de préavis pour la résiliation du contrat ;
  • le montant du salaire et des accessoires de salaire ;
  • le mode de rémunération du travailleur ainsi que la mention des avantages dont il bénéficie ;
  • la date et le lieu de conclusion du contrat.

 

ARTICLE 15

Le travailleur temporaire est sous l’autorité et la direction de l’entrepreneur.

Pendant sa mission, il est tenu de se conformer aux instructions et aux directives de l’utilisateur.

Il est également tenu de ne pas révéler les procédés de fabrication dont il aurait connaissance.

 

ARTICLE 16

Le travailleur temporaire perçoit une rémunération à la charge de l’entrepreneur qui ne peut être inférieure au salaire de sa catégorie professionnelle.

 

ARTICLE 17

Lorsque l’entrepreneur n’a pas délivré de bulletin de paye au travailleur, les réclamations relatives à la rémunération seront satisfaites en tenant compte de l’emploi occupé.

 

ARTICLE 18

En cas d’inaptitude du travailleur temporaire constatée, par un médecin notamment à la suite d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle, son contrat est réputé rompu.

 

ARTICLE 19

Des sanctions disciplinaires peuvent être infligées par l’entrepreneur sur proposition motivée de l’utilisateur après les explications écrites du travailleur.

 

ARTICLE 20

Tout travailleur temporaire qui a démissionné de son emploi ou qui a été licencié, peut offrir ses services et être embauché par toute autre entreprise.

 

ARTICLE 21

L’entrepreneur de travail temporaire peut à la suite d’une diminution d’activité procéder à un arrêt provisoire ou définitif de son activité conformément aux textes en vigueur.

 

ARTICLE 22

Avant tout arrêt définitif de son activité l’entrepreneur de travail temporaire est tenu de régler tous les droits acquis par ses travailleurs.

 

RELATIONS ENTRE L’ENTREPRENEUR DE TRAVAIL
TEMPORAIRE ET L’UTILISATEUR

ARTICLE 23

La convention qui lie l’entrepreneur de travail temporaire à l’utilisateur est une convention de prestation de service.

L’objet de cette convention est l’exécution d’une mission dont la durée est limitée à trois (3) mois, renouvelable trois fois par période d’un (1) mois au maximum.

 

ARTICLE 24

L’utilisateur peut recourir au service d’un travailleur notamment :

  • pendant la durée de l’absence ou le temps de suspension du contrat de travail du salarié, sauf en cas de conflit collectif (grève);
  • pour répondre à un surcroît occasionnel d’activité ou à la création d’activités nouvelles ;
  • pour des travaux urgents dont l’exécution immédiate est nécessaire pour prévenir des accidents imminents, organiser des mesures de sauvetage ou réparer des insuffisances du matériel,

 

ARTICLE 25

La convention de prestation de service conclue entre l’entrepreneur et l’utilisateur, doit être passée par écrit et préciser :

  • la durée de la mission ;
  • la nature du service à assurer ;
  • le motif précis justifiant le recours au travailleur temporaire ;
  • la qualification professionnelle du travailleur exécutant la mission ;
  • le lieu d’exécution de la mission, l’horaire et les caractéristiques particulières du travail à exécuter ;
  • les modalités de la prestation de service fournie à l’utilisateur (coût de la mission).

 

ARTICLE 26

Les tarifs pratiqués par l’entrepreneur doivent être approuvés par le ministre chargé du Travail et le ministre chargé du Commerce.

 

ARTICLE 27

En cas de défaillance de l’entrepreneur pour la rémunération qu’il doit au travailleur, l’utilisateur lui est substitué, pour le paiement du salaire et des accessoires du salaire, pour la durée de la mission.

 

ARTICLE 28

L’entrepreneur de travail temporaire est tenu de fournir à de l’utilisateur une attestation indiquant sa situation relative au recouvrement des cotisations au titre de la Caisse nationale de Prévoyance sociale et au titre des impôts sur les salaires dus à l’Administration fiscale.

En cas de défaillance de l’entrepreneur, l’utilisateur lui est substitué pour les cotisations et les impôts concernant la durée de la mission.

 

ARTICLE 29

Le travailleur temporaire n’est pas tenu d’exercer son activité pendant la durée d’une grève dans l’entreprise de l’utilisateur. Il est en droit de suspendre la mission pour cette période, en accord avec l’entrepreneur.

 

ARTICLE 30

En cas de cessation définitive du contrat de travail le liant à l’entrepreneur, le travailleur temporaire peut être embauché par l’utilisateur.

 

STATISTIQUES SUR L’ACTIVITE
DES ENTREPRISES DE TRAVAIL TEMPORAIRE

ARTICLE 31

L’entrepreneur de travail temporaire est soumis à l’obligation de déclaration périodique de main d’œuvre portant sur :

  • le nombre de travailleurs mis à la disposition d’utilisateurs ventilés par sexe, catégorie professionnelle et nature de l’occupation exercée ;
  • le nombre de travailleurs placés en mission, répartis par branche ou secteur d’activité professionnelle ;
  • le nombre d’utilisateurs répartis par branche ou secteur d’activité professionnelle ;
  • le nombre et la durée des missions effectuées par chaque travailleur ;
  • la masse salariale annuelle.

 

ARTICLE 32

Les relevés statistiques doivent être conservés par l’entrepreneur pendant un délai minimum de cinq (5) ans, pour être présentés, le cas échéant à toute autorité investie du pouvoir de contrôle de l’entreprise.

 

TRAVAUX POUR LESQUELS LE TRAVAIL TEMPORAIRE EST INTERDIT

ARTICLE 33

Le travail temporaire est interdit notamment pour :

  • les travaux souterrains (mines et chantiers souterrains) ;
  • la surveillance et l’entretien des installations électriques ;
  • les travaux de peinture ou vernissage par pulvérisation ;
  • les chantiers de travaux dans l’air comprimé ;
  • l’emploi des explosifs ;
  • les chantiers de carrières par galerie souterraine ;
  • la manipulation d’appareils exposant aux rayons X et radium.

 

ARTICLE 34

Par arrêté pris après avis du comité technique consultatif pour l’étude des questions intéressant l’hygiène et la sécurité des travailleurs, le ministre chargé du Travail pourra déterminer, d’autres travaux pour lesquels le travail temporaire est interdit.

 

ARTICLE 35

Constituent des contraventions de la troisième classe et sont punies comme telles, les infractions aux dispositions prévues aux articles 31 et 32 du présent décret,

 

ARTICLE 36

Quiconque exerce la profession d’entrepreneur de travail temporaire sans autorisation ou qui donne des indications fausses pour obtenir ou tenter d’obtenir cette autorisation sera puni des peines prévues à l’article 308 du Code pénal.

 

ARTICLE 37

Les infractions prévues aux articles 16, 17, 26, 27 du présent décret seront sanctionnées des peines de contravention de troisième classe.

 

ARTICLE 38

Le ministre de l’Emploi, de la Fonction publique et de la Prévoyance sociale est chargé de l’exécution du présent décret qui sera publié au Journal officiel de la République de Côte d’Ivoire.

Fait à Abidjan, le 7 mars 1996

Henri Konan BEDIE