RESILIATION DE BAIL N° 01

TRIBUNAL DE COMMERCE D’ABIDJAN
 
JUGEMENT CONTRADICTOIRE N° 470/2018 ET N° 634/2018 DU 02/05/2018
 
 
LOCATION D’UNE PARCELLE DE TERRAIN – IMPLANTATION D’ANTENNES 
RESEAUX  CESSATION DE PAIEMENT DES LOYERS –  PATRIMOINE IMMOBILIER
 COMMUNAL – DROIT DE PROPRIETE – RESILIATION DE CONTRAT DE BAIL
 
 
AFFAIRE :
 
MONSIEUR KO 
(ME SU)
 
CONTRE
 
1) LA SOCIETE MT
 
2) LA SOCIETE MO
(SCPA BI)
 
ET
 
LA SOCIETE MO
(SCPA BI)
 
CONTRE 
 
LA COMMUNE DE DIABO
 
LE TRIBUNAL,
 
 Vu les pièces au dossier ;
 
Ouï les parties en leurs demandes, fins et conclusions ;
 
Et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
 
 
FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES
 
Par exploit du 18 Janvier 2018, Monsieur KO a fait assigner les sociétés MT et MO par-devant la juridiction de ce siège, à l’effet de voir :
 
La résiliation des contrats de bail la liant aux défenderesses ;
 
Ordonner l’expulsion de celles-ci des lieux loués tant de leur personnes, de leurs biens, que de tout occupant de leurs chefs ;
 
Condamner d’une part, la société MT à lui payer la somme de 6.750.000 francs CFA et d’autre part, la société MO à lui payer celle de  10.800.000 francs CFA ;
 
Ordonner l’exécution provisoire du présent jugement ;
 
Au soutien de son action, Monsieur KO expose que courant année 2007, il a donné en location aux défenderesses, une parcelle de terrain nue sise dans la Sous-Préfecture de DIABO, à l’effet d’y implanter leurs antennes réseaux ;
 
Il affirme qu’au cours de l’année 2009, celles-ci ont subitement cessé de lui payer les loyers entre ses mains, au motif que la Commune de DIABO s’y est opposée, en arguant que la parcelle objet du bail fait partie du patrimoine immobilier communal , alors que son droit de propriété sur ladite parcelle n’a jamais été remise en cause, de même que les contrats de bail dont s’agit ;
 
Dans ces conditions, il indique qu’il leur a adressé le 26 Octobre 2017, une mise en demeure d’avoir à payer ses loyers, qui est restée sans suite ;
 
C’est pourquoi, sur le fondement de l’article 112 de l’acte uniforme portant sur le droit commercial général, il sollicite la résiliation desdits contrats de bail, ainsi que l’expulsion des sociétés MT et MO des parcelles qu’elles occupent au titre de la location ;
 
Pour sa part, la société MO, avant toute réplique, a fait assigner en intervention forcée la Commune de DIABO à comparaitre le Mercredi 21 Février 2018 par-devant la juridiction de céans ;
 
En outre, se prévalant des 11, 12 et 18 du code de procédure civile, commerciale et administrative, la société MO  a soulevé l’incompétence territoriale de la juridiction de céans ;
 
En effet, elle fait valoir que dans l’hypothèse où l’action en justice est relative à une matière réelle immobilière ou matière réelle mixte, le Tribunal territorialement compétent est celui de la situation de l’immeuble litigieux ;
 
Ainsi, selon elle, en tenant compte de ce que l’immeuble litigieux est sis à DIABO, la juridiction de ce siège doit se déclarer incompétente au profit du Tribunal de Première Instance de BOUAKE ;
 
Subsidiairement au fond, s’appuyant sur les dispositions de l’article 1315 du code civil, la société MO soutient que le demandeur ne peut obtenir gain de cause en l’espèce, que s’il justifie de son droit de propriété sur la parcelle objet du bail ;
 
Or, pour elle, ce dernier n’a pas été en mesure de rapporter la preuve de sa qualité de propriétaire de celle-ci ;
 
Par conséquent, elle conclut que son action doit être déclarée mal fondée et rejetée ;
 
En réaction, sur la forme, se prévalant de l’article 17 du code de procédure civile, commerciale et administrative, Monsieur KO conclut que le Tribunal de céans est bel et bien compétent pour connaitre de la présente action ;
 
En effet, pour lui, dès lors que ladite juridiction est compétente pour connaitre de sa demande principale, elle l’est également pour connaitre de toute demande accessoire ;
 
En seconde réplique, la société MO avance que cet argument de forme dont se prévaut le demandeur, est inopérant ;
 
Elle affirme que la question relative à la qualité de propriétaire du site objet de location, n’est pas une demande accessoire à la demande principale en résiliation et expulsion, mais constitue une question préjudicielle au jugement ;
 
Elle en déduit que seul le Tribunal de Première Instance de Bouaké est compétent pour connaitre du présent litige ;
 
En plus de cela, elle conclut à l’irrecevabilité de l’action, pour défaut d’intérêt à agir du demandeur ;
 
DES MOTIFS
 
Sur le caractère de la décision
 
Les sociétés MT et MO ayant eu connaissance de la procédure pour avoir été assignées à leur siège social, il y a lieu de statuer contradictoirement à leur égard ;
 
Sur le taux du ressort
 
Aux termes des dispositions de l’article 10 de la loi n° 2016-110 du 08 décembre 2016 portant création, organisation, et fonctionnement des juridictions de commerce, « Les tribunaux de commerce statuent :
 
  • En premier ressort, sur toutes les demandes dont l’intérêt du litige est supérieur à vingt-cinq millions de francs ou est indéterminé.
  • En premier et dernier ressort, sur toutes les demandes dont l’intérêt du litige n’excède pas vingt-cinq millions de francs » ;
 
En l’espèce, il résulte des énonciations de l’acte d’assignation par lequel la juridiction de céans est saisie, que monsieur KOUAKOU Amani Denis sollicite la condamnation des parties adverses à lui payer en tout, la somme de 16.550.000 francs CFA ;
 
L’intérêt du litige étant ainsi de 16.550.000 et inférieur à 25.000.000 de francs CFA, il y a lieu de statuer en premier et dernier ressort ;
 
Sur l’exception d’incompétence du tribunal de céans
 
Sur le fondement des articles 11 et suivants du code de procédure civile, commerciale et administratrice, la société MO soulève l’incompétence de la juridiction de céans au profit du Tribunal de Première Instance de Bouaké, lieu de situation de l’immeuble litigieux ;
 
Pour sa part, Monsieur KO prétend que la juridiction de ce siège est compétente pour connaitre de sa demande principale en résiliation de contrat de bail et expulsion, et par conséquent, de toute demande accessoire à celle-ci ;
 
Aux termes de l’article 3 de loi organique N° 2016-1110 du 08 décembre 2016 portant création, organisation et fonctionnement des juridictions de commerce : « la compétence des juridictions de commerce est déterminée par la présente loi et éventuellement par les lois spéciales »
 
En outre, suivant l’article 12 alinéa 1 du code de procédure civile, commerciale et administrative, le Tribunal territorialement compétent en matière réelle immobilière ou en matière mixte immobilière est celui de la situation de l’immeuble litigieux ;
 
Et l’article 18 alinéas 1 du code de procédure civile, commerciale et administrative dispose : « il peut être dérogé aux règles de compétence territoriale par convention expresse ou tacite » ;
 
Il en résulte que dès lors que l’action en justice porte en tout ou partie sur la protection ou la reconnaissance de droits sur un immeuble, le Tribunal territorialement compétent est celui de la situation dudit immeuble à moins que les parties en conviennent autrement ;
 
En l’espèce, la présente action initiée par Monsieur KO tend entre autre, à voir expulser les sociétés MT et MO d’une parcelle de terrain dont il se prétend propriétaire, sise à DIABO, sous-préfecture de la ville de Bouaké et qui a fait l’objet du contrat de bail conclu avec les défenderesses ;
 
Cette parcelle de terrain sur laquelle monsieur KO sollicite la protection de ses droits immobiliers étant située dans le ressort territorial du Tribunal de Première Instance de Bouaké, seule cette juridiction est territorialement compétente pour connaitre du présent litige surtout qu’il ne ressort pas que les parties, dans leur contrat de bail, ont attribué compétence au tribunal de ce siège, en cas de litige ;
 
Par conséquent, à défaut de dérogation conventionnelle aux règles de compétence territoriale contenues dans les textes précités, il y a lieu de se déclarer incompétent au profit dudit tribunal;
 
SUR LES DEPENS
 
Monsieur KO succombant à l’instance, il y a lieu de lui en faire supporter les dépens ;
 
PAR CES MOTIFS :
 
Statuant publiquement, contradictoirement, en premier et dernier ressort ;
 
Se déclare incompétent au profit du Tribunal de Première Instance de Bouaké;
 
Met les dépens à la charge de Monsieur KO.
 
PRESIDENT : Mme FIAN