TITRE IV : LES ETATS ARCHIPELS

ARTICLE 46

EMPLOI DES TERMES

Aux fins de la Convention, on entend par :

a) « Etat archipel » : un Etat constitué entièrement par un ou plusieurs archipels et éventuellement d’autres îles;

b) « archipel » : un ensemble d’îles, y compris des parties d’îles, les eauxattenantes et les autres éléments naturels qui ont les uns avec les autres des rapports si étroits qu’ils forment intrinsèquement un tout géographique, économique et politique, ou qui sont historiquement considérés comme tels.

 

ARTICLE 47

LIGNES DE BASE ARCHIPELAGIQUES

1. Un Etat archipel peut tracer des lignes de base archipélagiques droites reliant les points extrêmes des îles les plus éloignées et des récifs découvrants de l’archipel à condition que le tracé de ces lignes de base englobe les îles principales et définisse une zone où le rapport de la superficie des eaux à celle des terres, atolls inclus, soit compris entre 1 à 1 et 9 à 1.

2. La longueur de ces lignes de base ne doit pas dépasser 100 milles marins, toutefois, 3 p. 100 au maximum du nombre total des lignes de base entourant un archipel donné peuvent avoir une longueur supérieure, n’excédant pas 125 milles marins.

3. Le tracé de ces lignes de base ne doit pas s’écarter sensiblement du contour général de l’archipel.

4. Ces lignes de base ne peuvent être tirées vers ou depuis des hauts-fonds découvrants, à moins que des phares ou des installations similaires émergées en permanence n’y aient été construits ou que le haut-fond ne soit situé, entièrement ou en partie, à une distance de l’île la plus proche ne dépassant pas la largeur de la mer territoriale.

5. Un Etat archipel ne peut appliquer la méthode de tracé de ces lignes de base d’une manière telle que la mer territoriale d’un autre Etat se trouve coupée de la haute mer ou d’une zone économique exclusive.

6. Si une partie des eaux archipélagiques d’un Etat archipel est située entre deux portions du territoire d’un Etat limitrophe, les droits et tous intérêts légitimes que ce dernier Etat fait valoir traditionnellement dans ces eaux, ainsi que tous les droits découlant d’accords conclus entre les deux Etats, subsistent et sont respectés.

7. Aux fins du calcul du rapport de la superficie des eaux à la superficie des terres prévu au paragraphe 1, peuvent être considérées comme faisant partie des terres les eaux situées en deçà des récifs frangeants bordant les îles et les atolls ainsi que toute partie d’un plateau océanique à flancs abrupts entièrement ou presque entièrement cernée par une chaîne d’îles calcaires et de récifs découvrants.

8. Les lignes de base tracées conformément au présent article doivent être indiquées sur des cartes marines à l’échelle appropriée pour en déterminer l’emplacement. Des listes des coordonnées géographiques de points précisant le système géodésique utilisé peuvent être substituées à ces cartes.

9. L’Etat archipel donne la publicité voulue aux cartes ou listes des coordonnées géographiques et en dépose un exemplaire auprès du Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies.

ARTICLE 48

MESURES DE LA LARGEUR DE LA MER TERRITORIALE, DE LA ZONE CONTIGUË,
DE LA ZONE ECONOMIQUE EXCLUSIVE ET DU PLATEAU CONTINENTAL

La largeur de la mer territoriale, de la zone contiguë, de la zone économique exclusive et du plateau continental est mesurée à partir des lignes de base archipélagiques conformément à l’article 47.

 

ARTICLE 49

REGIME JURIDIQUE DES EAUX ARCHIPELAGIQUES ET DE L’ESPACE AERIEN SURJACENT
AINSI QUE DES FONDS MARINS CORRESPONDANTS ET DE LEUR SOUS-SOL

1. La souveraineté de l’Etat archipel s’étend aux eaux situées en deçà des lignes de base archipélagiques tracées conformément à l’article 47, désignées sous le nom d’eaux archipélagiques, quelle que soit leur profondeur ou leur éloignement de la côte.

2. Cette souveraineté s’étend à l’espace aérien surjacent aux eaux archipélagiques, ainsi qu’au fonds de ces eaux et au sous-sol correspondant, et aux ressources qui s’y trouvent.

3. Cette souveraineté s’exerce dans les conditions prévues par la présente partie.

4. Le régime du passage archipélagique qu’établit la présente partie n’affecte à aucun autre égard le régime juridique des eaux archipélagiques, y compris les voies de circulation, ni l’exercice par l’Etat archipel de sa souveraineté sur ces eaux, l’espace aérien surjacent, le fond de ces eaux et le sous-sol correspondant, ainsi que sur les ressources qui s’y trouvent.

 

ARTICLE 50

DELIMITATION DES EAUX INTERIEURES

A l’intérieur de ses eaux archipélagiques, l’Etat archipel peut tracer des lignes de fermeture pour délimiter ses eaux intérieures, conformément aux articles 9, 10 et

 

ARTICLE 51

ACCORDS EXISTANTS, DROITS DE PECHE TRADITIONNELS
ET CABLES SOUS-MARINS DEJA EN PLACE

1. Sans préjudice de l’article 49, les Etats archipels respectent les accords existants conclus avec d’autres Etats et reconnaissent les droits de pêche traditionnels et les activités légitimes des Etats limitrophes dans certaines zones faisant partie de leurs eaux archipélagiques. Les conditions et modalités de l’exercice de ces droits et activités, y compris leur nature, leur étendue et les zones dans lesquelles ils s’exercent, sont, à la demande de l’un quelconque des Etats concernés, définies par voie d’accords bilatéraux conclus entre ces Etats. Ces droits ne peuvent faire l’objet d’un transfert ou d’un partage au bénéfice d’Etats tiers ou de leurs ressortissants.

2. Les Etats archipels respectent les câbles sous-marins déjà en place qui ont été posés par d’autres Etats et passent dans leurs eaux sans toucher le rivage. Ils autorisent l’entretien et le remplacement de ces câbles après avoir été avisés de leur emplacement et des travaux d’entretien ou de remplacement envisagés.

 

ARTICLE 52

DROIT DE PASSAGE INOFFENSIF

1. Sous réserve de l’article 53 et sans préjudice de l’article 50, les navires de tous les Etats jouissent dans les eaux archipélagiques du droit de passage inoffensif défini à la section 3 de la partie II.

2. L’Etat archipel peut, sans établir aucune discrimination de droit ou de fait entre les navires étrangers, suspendre temporairement, dans des zones déterminées de ses eaux archipélagiques, l’exercice du droit de passage inoffensif de navires étrangers si cette mesure est indispensable pour assurer sa sécurité. La suspension ne prend effet qu’après avoir été dûment publiée.

 

ARTICLE 53

DROIT DE PASSAGE ARCHIPELAGIQUE

1. Dans ses eaux archipélagiques et la mer territoriale adjacente, l’Etat archipel peut désigner des voies de circulation et, dans l’espace aérien surjacent à ces voies, des routes aériennes qui permettent le passage continu et rapide des navires ou aéronefs étrangers.

2. Tous les navires et aéronefs jouissent du droit de passage archipélagique par ces voies de circulation et ces routes aériennes.

3. On entend par « passage archipélagique » l’exercice sans entrave par les navires et aéronefs, selon leur mode normal de navigation et conformément à la Convention, des droits de navigation et de survol, à seule fin d’un transit continu et rapide entre un point de la haute mer ou d’une zone économique exclusive et un autre point de la haute mer ou d’une zone économique exclusive.

4. Ces voies de circulation et routes aériennes qui traversent les eaux archipélagiques et la mer territoriale adjacente ou l’espace aérien surjacent doivent comprendre toutes les routes servant normalement à la navigation internationale dans les eaux archipélagiques et l’espace aérien surjacent; les voies de circulation doivent suivre tous les chenaux servant normalement à la navigation, étant entendu qu’il n’est pas nécessaire d’établir entre un point d’entrée et un point de sortie donnés plusieurs voies de commodité comparables.

5. Ces voies de circulation et routes aériennes sont définies par une série de lignes axiales continues joignant leurs points d’entrée aux points de sortie. Durant leur passage, les navires et aéronefs ne peuvent s’écarter de plus de 25 milles marins de ces lignes axiales, étant entendu qu’ils ne doivent pas naviguer à une distance des côtes inférieure au dixième de la distance qui sépare les points les plus proches des îles bordant une voie de circulation.

6. L’Etat archipel qui désigne des voies de circulation en vertu du présent article peut aussi prescrire des dispositifs de séparation du trafic pour assurer la sécurité du passage des navires empruntant des chenaux étroits à l’intérieur de ces voies.

7. Quand les circonstances l’exigent, l’Etat archipel peut, après avoir donné à cette mesure la publicité voulue, désigner de nouvelles voies de circulation ou prescrire de nouveaux dispositifs de séparation du trafic en remplacement de toutes voies ou de tous dispositifs antérieurement établis par lui.

8. Ces voies de circulation et dispositifs de séparation du trafic doivent être conformes à la réglementation internationale généralement acceptée.

9. Lorsqu’il désigne ou remplace des voies de circulation ou qu’il prescrit ou remplace des dispositifs de séparation du trafic, l’Etat archipel soumet ses propositions pour adoption à l’organisation internationale compétente. Cette organisation ne peut adopter que les voies de circulation et les dispositifs de séparation du trafic dont il a pu être convenu avec l’Etat archipel; celui-ci peut alors les désigner, les prescrire ou les remplacer.

10. L’Etat archipel indique clairement sur des cartes marines auxquelles il donne la publicité voulue les lignes axiales des voies de circulation qu’il désigne et les dispositifs de séparation du trafic qu’il prescrit.

11. Lors du passage archipélagique, les navires respectent les voies de circulation et les dispositifs de séparation du trafic établis conformément au présent article.

12. Si l’Etat archipel n’a pas désigné de voies de circulation ou de routes aériennes, le droit de passage archipélagique peut s’exercer en utilisant les voies et routes servant normalement à la navigation internationale.

 

ARTICLE 54

OBLIGATIONS DES NAVIRES ET DES AERONEFS PENDANT LEUR PASSAGE,
RECHERCHE ET LEVES HYDROGRAPHIQUES, OBLIGATIONS DES ETATS ARCHIPELS
ET LOIS ET REGLEMENTS DE L’ETAT ARCHIPEL CONCERNANT LE PASSAGE ARCHIPELAGIQUE

Les articles 39, 40, 42 et 44 s’appliquent mutatis mutandis au passage archipélagique.