HISTORIQUE DE L’AFFAIRE OUTREAU
Cette histoire aura duré plus de 4 ans, débutant le 22 février 2001 et finissant le 1er décembre 2005. Ces 4 années auront été un véritable enfer pour les suspects, condamnés et acquittés.
LE DEBUT DE L’AFFAIRE
Les enfants de Thierry et Myriam Delay sont placés dans des familles d’accueils à partir du 25 février 2000 du fait de la demande expresse de Mme Myriam Badaoui épouse Delay dénonçant des violences de son mari. En décembre, ces enfants parlent à leurs assistantes sociales de choses que leur aurait fait subir un certain nombre de personnes. De bonne foi, les assistantes sociales croient les enfants, et préviennent légitimement les services sociaux.
La direction de l’enfance du Pas-de-Calais, à Boulogne-sur-Mer, fait un « signalement », en janvier 2001, au procureur de la République de la ville, Gérald Lesigne. Le parquet déclenche alors l’action publique. L’enquête policière et, par la suite judiciaire, démarre.
Alors, en garde à vue, la mère avoue en partie les faits. Jusqu’en novembre, plusieurs dizaines de suspects sont aussi placés en garde à vue. Les avocats ne peuvent accéder au dossier ni même être présents lors des interrogatoires.
En 2001, le tribunal de Boulogne-sur-Mer ne compte que trois juges d’instruction , dont Fabrice Burgaud, 30 ans, qui occupe son premier poste depuis à peine une année. L’information est ouverte le 22 février 2001. Dès lors, les mises en examen démarrent.
LE DEBUT DE L’INSTRUCTION
Le juge, voulant placer les mis en cause en détention provisoire, effectue une demande au juge des libertés et de la détention, qui en décide après des réquisitions du parquet. En théorie, la détention ne peut être ordonnée que si elle constitue « l’unique moyen de mettre fin à un trouble exceptionnel à l’ordre public », ce qui sera le cas pour 17 personnes. Une seule personne sera laissée libre. Une va mourir en prison.
Les demandes de remise en liberté ont toujours été refusées.
Parallèlement aux mises en détention des parents, 24 enfants mineurs sont placés dans des familles d’accueil. Les parents sont alors destitués de tout droit pour le temps de la procédure.
A PARTIR DE NOVEMBRE 2001, L’AFFAIRE EST MEDIATISEE ET LA FRANCE ENTIERE EST CHOQUEE. LA MACHINE MEDIATIQUE EST LANCEE
Devant le nombre important d’accusés, et le nombre d’enfants placés dans des familles, le juge Burgaud s’oriente vers l’existence d’un réseau pédophile. Il faut parler de l’affaire Dutroux qui avait marqué peu de temps avant la Belgique, avec un réseau pédophile pareil.
Malgré des fouilles organisées à Outreau dans le 10 janvier 2002 dans le but de rechercher une fillette belge qui aurait été violée puis tuée, l’instruction ne repose que sur des témoignages et des aveux après des heures de garde à vue.
Les accusés souhaitaient être confrontés individuellement aux 4 adultes accusateurs et aux enfants.
Or dès 17 janvier 2002, deux suspects disculpent plusieurs mis en cause. Ce qui n’aura aucun effet en ce qui concerne l’instruction. La chambre d’instruction de Douai a toujours confirmé, à de rares exceptions près, les refus d’actes d’instruction du juge et a rejeté toutes les demandes de remises en liberté au cours des investigations.
De nombreuses enquêtes d’expertise ont été demandées par le juge Burgaud en ce qui concerne la crédibilité des témoignages des enfants. Elles sont psychologiques, biologiques, sociologiques.
Elles n’étaient pas toutes en accord avec le juge Burgaud.
LE RENVOI DEVANT LES JURIDICTIONS COMPETENTES
C’est pourquoi le juge Burgaud a décidé de renvoyer les intéressés devant les juridictions compétentes au lieu de rendre une ordonnance de non lieu. L’instruction d’Outreau est close en septembre 2002.
En juillet 2003, les avocats de neuf accusés demandent, en vain, un non-lieu à la chambre de l’instruction de Douai.
Au dessus de la chambre d’instruction de la cour d’appel, il y a encore la direction des affaires criminelles et des grâces du ministère de la justice qui supervise dans leur détail les affaires pénales sensibles. Ces magistrats sont soumis à leur hiérarchie. Comme ce fut le cas pour Outreau. Pourtant il n’y a pas eu de rapports négatifs.
Dès lors, le procès devant la cour d’assises du Pas-de-Calais siège à Saint-Omer pendant neuf semaines, à partir du 4 mai 2004. Dix-sept personnes sont accusées. Parmi elles, six seulement comparaissent libres. Dix-sept enfants sont parties civiles.
Le 18 mai 2004, Myriam Delay innocente treize de ses co-accusés. Le dossier s’effondre. Entendu, le juge Burgaud ne reconnaît aucune erreur. Huit accusés détenus sont remis en liberté.
Le 2 juillet 2004, la cour d’assises prononce dix condamnations et sept acquittements, après seize heures de délibéré. Deux condamnés qui se disent innocents retournent en prison.
Comme vous le savez, la loi sur la présomption d’innocence du 15 juin 2000, entrée en vigueur en 2001 permet de faire appel devant une nouvelle cour d’assises. Devant l’exceptionnelle affaire, Paris est choisi. Six des dix condamnés de Saint-Omer font appel.
LA CONCLUSION ET L’ACQUITTEMENT QUASI GENERAL
Le second procès est programmé pour le 10 mai 2005, mais, quelques semaines plus tôt, un documentaire de France 5 évoque une possible homonymie concernant l’un des accusés. La présidente de la cour d’assises d’appel, Odile Mondineu-Hederer, renvoie le procès et ordonne un supplément d’information. L’audience s’ouvre le 7 novembre. Myriam Delay, à la barre, disculpe les six accusés.
La cour d’assises d’appel de Paris acquitte tous les accusés le 1er décembre. L’Etat présente ses excuses.
L’affaire d’Outreau aboutit à quatre condamnations définitives et à treize acquittements. Sur les dix-sept enfants initialement considérés comme victimes, seuls les quatre fils du couple Delay sont finalement reconnus comme tels.
LES ERREURS DANS CETTE AFFAIRE
Le rapport de la commission parlementaire de 2006 permet de dégager toutes les erreurs dans la procédure. Devant le nombre impressionnant de pages (150 rien que pour les erreurs)
LE RÔLE DES ASSISTANTES MATERNELLES ET L’ABSENCE DE PRUDENCE SUR LES PROPOS DES ENFANTS :
Finalement les assistantes ont, sans le vouloir, inventé les accusations par l’interprétation des propos des enfants. Certains propos ont été tellement exacerbés que de simples personnes croisées dans la rue et connues de tous dans cette ville ont été emprisonnées pour rien. Les propos de ces assistantes aux enfants n’ont fait que pousser les enfants à croire les interprétations de celles-ci.
Les audiences ont été nombreuses, longues, très étalées dans le temps. Les enfants ne peuvent être encadrés dans des conditions pareilles. Cela a des incidences obligatoires sur leurs propos.
De plus, les enfants n’ont pas été réellement séparés. Même dans les familles d’accueil, ils n’habitaient guère loin les uns des autres. Il y a eu quelques contacts entre eux, surtout qu’ils étaient convoqués en même temps dans les bureaux de la police.
LE RÔLE DES EXPERTS
Près de 84 expertises psychiatriques et psychologiques ont été réalisées au total. Il s’est révélé que, plus on faisait d’expertises, plus on s’éloignait de la vérité de la personnalité de tous les acteurs dans cette affaire. De plus, il y a eu de nombreuses contradictions entre les experts psychiatriques et les experts psychologiques, qui sont inhérents à la différenciation de ces deux matières.
On peut également dire qu’en fonction de la tournure de la question, la réponse est plus ou moins orientée. Cela complique la lecture des résultats.
Certaines expertises ont été faites à la va-vite : deux experts ont fait 4 expertises psychologiques ou psychiatriques et rédigé 3 rapports en une journée seulement. Cela parait un peu rapide.
De plus, de nombreuses expertises demandées par la défense ont été refusées.
LE RÔLE DES MEDIAS
Comme l’ont reconnu de nombreux médias, la façon de présenter les évènements a orienté l’opinion publique. Cela a causé une forme de pression sur le juge Burgaud. D’ailleurs, certains journaux ou chaînes de télévision (France 3 par exemple), ont créé des chartes de qualité quant au suivi de leurs propos, images.
Il y a eu un certain manque de prudence, mais aussi de rigueur, ce qui est dommageable. Il y a eu trop de certitudes, trop de faits présentés comme réels alors qu’il n’y avait aucune preuve.
On peut ajouter : des images sans autorisation des personnes concernées, aucun respect de la protection de la vie privée, aucun anonymat sur les enfants présentés comme victimes.
Tout cela a forcément eu un impact sur les propos des enfants.
On peut aussi critiquer le retournement remarquable des médias dès que la conjoncture judiciaire a changé sur cette affaire.
Ces mêmes critiques sont toujours présentes pendant l’audition du juge Burgaud devant la commission, qui sera présentée sur France 2 (mais pas dans son intégralité) devant près de 5 millions de personnes.
LA FAMILLE DELAY : UNE FAMILLE CONNUE POUR SES PROBLEMES
L’enfant de 10 ans avait déjà fait l’objet d’une mesure de placement le 30 juin 1995 et se trouvait depuis 1998 en famille d’accueil. Les trois autres enfants étaient pris en charge par les services sociaux.
Ils vivaient dans un contexte pénal, économique et social défavorable, marqué par de nombreuses affaires pénales en matières sexuelles. Cela a pu influencer le juge.
De même, c’est la mère de famille qui a été le principal instigateur de cette affaire. En effet, c’est elle qui a dénoncé de nombreuses personnes. C’est sur ses propos que toute l’affaire a tenu pendant des années.
Elle s’est révélée mythomane, voire perverse qui, par vengeance et par intérêt, a pensé qu’elle et ses complices atténueraient leurs responsabilités en impliquant un maximum de tiers dans la procédure.
LE CAS BURGAUD
Le juge Burgaud était désigné dans cette affaire alors qu’il n’avait qu’une faible expérience. Il a été catapulté sur ce dossier très lourd et très difficile.
Il a fauté pourtant en réalisant une instruction univoque. L’enquête a tenté en vain de trouver des preuves matérielles. I n’y a eu de recherche que d’éléments à charge et non d’éléments permettant de prouver qu’il n’y avait pas eu de viols.
De plus, la présomption d’innocence s’est révélée faiblement suivie. Malgré l’absence de preuves, le juge a prononcé des mises en examen pour des faits passibles de la réclusion criminelle à perpétuité et a continué à instruire un meurtre en l’absence de tout élément matériel démontrant leur existence.
« UNE CHAINE DE RESPONSABILITE »
Comme l’a dit Roselyne Godard : « le juge d’instruction n’est pas le seul responsable de ces errements, c’est toute une chaîne de responsabilités ». Le juge Burgaud a fait des erreurs mais il n’est pas le seul. La chambre d’instruction et la cour d’appel de Douai, supposées exercer un contrôle sur l’action du magistrat instructeur, se sont en réalité limitées à un examen purement formel du dossier. Ils ne se sont préoccupés du fond de la procédure, tout en ignorant de façon systématique les nombreuses demandes faites par la défense, permettant ainsi au magistrat instructeur d’agir en dehors de tout contrôle.
KARINE DUCHOCHOIS : « Moi je veux bien qu’on dise Monsieur Burgaud n’était pas tout seul, il y a d’autres responsables, c’est toute l’institution qui a dysfonctionné, d’accord mais Monsieur Burgaud a de vrais responsabilités là-dedans ».
IRRESPECT DES DROIT DE LA DEFENSE
La demande de la défense qui sollicitait le droit, pour chacun des accusés, d’être confronté non pas collectivement mais individuellement à chacun de ses accusateurs, n’a jamais obtenu de réponse favorable.
La détention préventive a été utilisée comme moyen de pression sur les mis en examen . La présomption d’innocence n’était pas présente tout au long de la procédure.
L’un des prévenu est même mort d’une overdose de sédatifs et d’autres médicaments qui lui étaient administrés en prison pour qu’il « se tienne tranquille ».
Karine Duchochois : « Pendant ma garde à vue, j’ai pris deux gifles par un inspecteur »
Thierry Dausque : « J’ai été un an et demi sans avocat, ils étaient désignés d’office mais pas prévenus de mes interrogatoires » (…) «
Odile Marécaux : « Vous avez compris comment on est entrés dans la machine à broyer, on en est tous sortis très difficilement ». Alors qu’elle était assise par terre pendant sa garde à vue : « Un inspecteur m’a dit : ’c’est pas assez bas, vous êtes une sale pédophile’ »
LES REMISES EN QUESTION DE LA JUSTICE APRES L’AFFAIRE D’OUTREAU
La commission parlementaire Outreau, en 2006, a effectué de nombreuses propositions :
* réforme du régime de garde à vue : par l’autorisation d’accès pour l’avocat au dossier, enregistrer les interrogatoires par exemple.
* plus de contradictions dans les enquêtes du parquet : accès au dossier facilité, reconnaitre à l’avocat le droit de présenter des observations par exemple.
* limitation de la détention provisoire : limite de la durée maximale de la détention provisoire, un plus grand encadrement légal de cette détention :
* Collégialité de l’instruction : mettre un âge minimum pour les magistrats sur les affaires de viols, nouvelle organisation de l’instruction
* Mieux protéger l’intérêt des enfants : Décloissonement des services sociaux, Favoriser les concertations entre les différents acteurs, redéfinir les condition de recueil des déclarations des enfants.
* Plus grande responsabilisation : des médias, des magistrats avec un plus grand suivi de la carrière…
QUELS ONT ETE LES VERITABLES EVOLUTIONS APRES CETTE AFFAIRE ?
On sait que l’opinion publique a été touchée par cette affaire. Les hommes politiques ont donc dû répondre à la volonté publique de réformer la justice. D’autant plus qu’à l’approche de l’élection présidentielle de 2007, il fallait marquer un grand coup.
La réforme de la Justice a donc été entérinée par Jacques Chirac le 24 octobre 2006 dans le but d’une adoption au printemps 2007. Pascal Clément, pour accélérer l’adoption de cette réforme, a demandé au premier ministre l’utilisation de la procédure d’urgence qui limite à une lecture par assemblée et par texte.
On prévoyait alors un coût de 30 millions d’euros. Soit l’embauche de 70 magistrats, et 102 greffiers.
Alors que l’on avait parlé d’une grande réforme, on voit que ce n’est qu’une proposition faible. 30 millions d’euros c’est très peu. On a totalement négligé le volet sur la responsabilité des magistrats mis à part la création d’une faible faute disciplinaire, au point que Pascal Clément fut obligé d’avouer que ce texte « n’était que la première étape de la rénovation de la justice ». Il ne se mouilla pas sachant qu’il ne serait plus Garde des Sceaux un an après.
Le projet de loi contient également : un enregistrement audiovisuel des gardes à vue pour limiter les soupçons et une caméra dans le cabinet du juge d’instruction.
On a parlé aussi de création de pôles d’instruction avec une co-saisine pour les affaires principales.
Et tout justiciable qui s’estimera victime d’un dysfonctionnement de la justice pourra saisir le médiateur de la République.
Après son vote en 2007, la réforme s’est vue amputée de deux dispositions. Le Conseil Constitutionnel a refusé la création d’une faute disciplinaire des magistrats et au nom du principe de la séparation des pouvoirs, le conseil a refusé que le citoyen puisse saisir le médiateur de la république pour alerter, par la suite, le garde des Sceaux.
Finalement, on le voit, il n’y a pas eu de véritable réforme de la Justice. Il faut attendre Novembre 2008, pour que Nicolas Sarkozy lance le débat en ce qui concerne le juge d’instruction et qu’il y ait une véritable réforme de la procédure pénale.
LE CHEF DE L’ETAT A PROPOSE
Que l’avocat participe entièrement à la nouvelle instruction.
Cela marque le passage d’un juge d’instruction pour confier les enquêtes judiciaires au parquet sous le contrôle d’un magistrat du siège : un juge de l’instruction ;
Il faut tout de même préciser que cela crée un débat car on peu craindre un renforcement de la mainmise du pouvoir sur les enquêtes. Et comme on l’a vu lors de l’affaire Outreau et de nouvelles affaires depuis, les politiques tirent souvent des conclusions rapides, sans études du dossier pour faire finalement le buzz médiatique. Ainsi le pouvoir pourrait mettre de plus en plus de pression en fonction de l’affaire. D’où la nécessité de séparation des pouvoirs chez Montesquieu.
LE JUGE BURGAUD DEVANT LE CONSEIL SUPERIEUR DE LA MAGISTRATURE
Début février 2009, le juge Burgaud doit répondre de son travail devant le conseil supérieur de la magistrature qui a les compétences pour le punir pour faute. Il faut savoir que seul le juge Burgaud comparait alors que tout le monde s’accorde à penser qu’il y a eu une chaîne de responsabilité.
Les poursuites contre Burgaud ont été engagées par le Garde des Sceaux pour accumulation d’insuffisances.
COMMENT S’EST ALORS DEROULEE CETTE AUDITION ET QUELS ONT ETE LES RESULTATS ?
Cela se résume à 5 jours d’audience, 30 000 pages dans le dossier, 26 cartons de dossiers, interventions de plus de 60 magistrats et surtout plus de deux mois de réflexion quant à la sanction du juge Burgaud.
La liste des griefs a été transmise au juge Burgaud à l’avance. Pourtant elle reste secrète mais elle permet au juge Burgaud de répondre à ceux-ci de la manière la plus claire possible.
Tous les observateurs s’accordent sur le fait que Burgaud a été très bon. Il a réfuté tous les griefs, a même rappelé des points de droit tel que, par exemple : « Je ne pouvais pas certifier conformes les expertises. Seul un greffier peut le faire. C’est la loi » dit-il.
Il a d’ailleurs rappelé qu’il a été noté par la Chancellerie à 4 reprises entre 2001 et 2007 dont une fois pendant l’affaire Outreau. Il a reçu à chaque fois d’excellentes notes.
Il estime qu’il a subi une forme d’acharnement de la part des politiques mais aussi de la Chancellerie, estimant qu’il n’a jamais réellement pris les décisions tout seul.
Il avoue pourtant que son instruction n’a pas été parfaite. Il avoue qu’il a beaucoup interrogé les enfants pour éviter de prendre « pour argent comptant » leurs propos dit-il. Mais il est vrai que cela a beaucoup fatigué les enfants moralement et physiquement.
Une phrase très important a été prononcée par le Juge Burgaud répondant à ceux qui pensent qu’il a berné les magistrats qui lui sont supérieurs : « Moi, avec seulement 6 mois d’expérience, j’aurai berné 60 magistrats dont certains avaient 20 ou 30 ans de métier ? Ces derniers n’ont pas relevé de fautes. Je le redis, je ne prétends pas avoir effectué un travail parfait. Cette affaire était d’une grande complexité… ». Il a rappelé qu’à l’époque, il gérait en parallèle à l’affaire Outreau plus de 100 dossiers.
Après deux mois d’attente, le conseil supérieur de la magistrature a rendu son verdict. C’est la réprimande qui a été choisi à 6 voix contre 5.
Cette sanction est la plus faible sur l’échelle des sanctions qui en comportent neuf.
Il faut savoir que c’est la première fois que le CSM sanctionne des erreurs techniques alors que normalement ce sont des erreurs plutôt comportementales qui sont punies.
Le juge Burgaud a annoncé qu’il devrait faire appel, car le plus important pour lui est de retrouver son honneur.
CRITIQUES DE CETTE AUDITION
Les deux mois d’attente sont la preuve de débats houleux. D’ailleurs, la sanction de blâme n’a été votée qu’à une voix près. Le CSM n’est donc pas d’accord sur cette affaire qui n’en finit pas de créer le débat.
Le CSM connait une double critique. D’un coté, les accusés trouvent que la sanction est trop légère et surtout qu’elle ne concerne pas nécessairement le seul coupable. De l’autre, les magistrats trouvent que cette sanction est totalement infondée puisque le juge Burgaud « s’est trompé sans avoir fauté »
En outre, on critique la mollesse du CSM qui n’a pas osé trancher. Alors que tous les acteurs de cette affaire attendait une fin digne avec une sanction ou non mais avec une vraie décision, on leur offre une fausse sanction. Cela n’arrange personne puisque l’affaire est maintenant relancée médiatiquement.
En même temps, on reproche aussi le fait que le Juge Burgaud ne soit que le bouc émissaire d’un dysfonctionnement de plus de 60 personnes. Des juges sanctionnent d’autres juges et on suppose un esprit de corps empêchant d’être honnête face à l’affaire.
Qui plus est, une des 11 personnes membres du CSM siègeait à la cour d’appel de Douai pendant l’affaire et a repoussé des demandes de remise en libertés de certains accusés. Il y a donc ici conflit d’intérêt. Au point que cela puisse créer un vice de forme et annuler la décision.
ON VOIT QUE L’AUDIENCE EST LOIN DE CLORE L’AFFAIRE, CE QUI ETAIT POURTANT SON RÔLE
Les conclusions dépassent cette affaire comme le montre Alain Salles, journaliste au Monde :
« La décision du CSM contre le juge burgaud est principalement une décision de compromis qui ne satisfait personne. Burgaud est sanctionné, on lui reproche un certain nombre de manquements, répétés, assez importants, principalement dans ses conduites d’interrogatoire. En même temps, toute une partie des faits est couvert par l’amnistie de l’élection présidentielle de 2002. Finalement, on lui reproche des manquements sur une période de 2 mois, ce qui aboutit à une réprimande qui est la sanction la plus faible du CSM.
Les avocats d’Outreau considèrent que c’est peu. Les magistrats considèrent que c’est déjà beaucoup, car cela crée un précédent, parce que dans les reproches que l’on fait au juge burgaud, c’est quelque chose qui n’avait jamais été sanctionné jusque là par le csm.
C’est une brèche dans la conduite d’autres instructions, surtout que le justiciable peu maintenant saisir par lui même le CSM depuis la réforme de juillet 08.
Il pourra alors se prévaloir de la jurisprudence burgaud pour contester la façon dont l’instruction a été menée par le juge d’instruction et plus tard si le juge d’instruction disparaît par le magistrat du parquet. »
Source : www.agoravox.fr