AFFAIRE DU CURE D’URUFFE

L’Affaire du Curé d’Uruffe est un fait divers français qui défraya la chronique dans les années 1950. Il concerne le crime commis par le prêtre catholique Guy Desnoyers (1920-2010)

.Il est né le 24 février 1920 à Haplemont, un hameau du Saintois en Meurthe-et-Moselle. Issu d’une famille paysanne assez aisée et pieuse, il est promis très jeune à la prêtrise par sa grand-mère maternelle, personnalité dominante dans la famille. Il part au petit, puis au grand séminaire à Bosserville et Villers-lès-Nancy. On le décrit comme un « bon gosse » mais ses pairs émettent des doutes sur sa vocation.

Pendant la Seconde Guerre mondiale, il est réquisitionné pour travailler dans une usine de Neuves-Maisons sous direction allemande, mais il aide également des prisonniers évadés chez son oncle par alliance Émile Marulier à Harol dans lesVosges. A la Libération, il prétendra même avoir tué un factionnaire allemand sans pouvoir en apporter la preuve.

La guerre terminée, il est ordonné prêtre en 1946, puis affecté à Blâmont comme vicaire. Son supérieur, l’abbé Klein, constate que sa nouvelle recrue préfère jouer au basket plutôt que lire de la théologie. Dès cette première nomination, alors qu’il a vingt-six ans et qu’il est encore vierge, il a une première liaison avec une femme, Madeleine.

Cette liaison va être la cause d’une mutation autoritaire de ses supérieurs comme vicaire à Réhon, dans le nord de la Meurthe-et-Moselle. On lui prêtera alors d’autres aventures féminines, notamment avec une veuve fortunée qui vient tout juste de perdre son époux. Celle-ci lui donnera 150 000 francs pour la réfection du toit de l’église et pour l’achat d’une 2 CV. Cela ne l’empêche pas de continuer à voir régulièrement Madeleine. Ainsi, tout en ayant des relations avec d’autres maîtresses, la relation entre Guy et Madeleine durera jusqu’en octobre 1956, soit dix années.

En juillet 1950, il est nommé curé de la paroisse d’Uruffe (392 âmes). Prêtre actif et plutôt apprécié de ses paroissiens, il s’illustre notamment en montant avec les jeunes garçons du coin une équipe de football.
Les anciens du village trouvent ce prêtre assez singulier, mais les jeunes aiment cette personnalité « moderne » pour l’époque. Ils le trouvent accessible. Mais Guy Desnoyers entretient des relations avec plusieurs femmes de la région, dont certaines sont mineures.

En décembre 1953, Guy Desnoyers conçoit un enfant avec une adolescente de quinze ans, Michèle Léonard.

Suite aux rumeurs qui courent dans le village, il persuade Michèle d’accoucher clandestinement dans l’Ain et d’abandonner « l’enfant du péché ».

L’évêque de Nancy, Marc-Armand Lallier, qui prend connaissance de ces faits, décide de rendre visite au prêtre. Celui-ci se jette à ses genoux et demande à son évêque de croire en son innocence.

L’entrevue a ébranlé Monseigneur Lallier qui renouvelle sa confiance au prêtre.

Les mois se succèdent alors avec des absences répétées du curé qui inquiètent ses paroissiens. Guy Desnoyers évoquera plus tard des périodes « de tourments et d’angoisse ».

LE DRAME

En 1956, il a une relation avec Régine Fays, jeune fille d’Uruffe, âgée de 19 ans, qui travaille comme ouvrière à la verrerie de Vannes-le-Châtel.

Séduite au cours d’une activité théâtrale qu’il avait créée, elle se trouve enceinte des œuvres du prêtre, comme Michèle en 1953. Desnoyers persuade le père de Régine que l’amant de sa fille est un jeune homme du crû qui l’a violée au cours d’une fête du village et qui est parti pour la Guerre d’Algérie.

Peu de monde croit en son histoire et il proteste publiquement devant ses paroissiens en dénonçant une calomnie.

Régine promet de garder le secret de la paternité de l’enfant mais refuse d’accoucher clandestinement, d’abandonner son enfant ou d’avorter.

Le 3 décembre 1956, peu avant la date prévue pour l’accouchement, Guy Desnoyers prend peur et entraîne Régine sur la petite route déserte qui mène à Pagny-la-Blanche-Côte.
Il arrête sa 2 CV près d’un bosquet et à deux reprises propose à la jeune fille de lui donner l’absolution.

Étonnée, celle-ci refuse et s’éloigne à pied. Guy Desnoyers la suit tenant son revolver 6,35 à la main. Il tire alors à trois reprises sur sa maîtresse dans la nuit noire.

Sitôt après l’avoir tuée, il l’éventre à l’aide d’un canif de scout, sort le fœtus viable (elle est alors enceinte de 8 mois et l’autopsie révélera que le nourrisson était en vie), une petite fille qu’il baptise.

Il la tue à coups de couteau, puis lui taillade le visage afin d’effacer toute éventuelle ressemblance. Il pousse ensuite la mère et son enfant dans un fossé.

Dès le lendemain, il organise lui-même les recherches pour retrouver Régine, tout en prétendant qu’il connaît le meurtrier mais qu’il lui est impossible de le dénoncer à cause du secret de la confession auquel il est lié.

Cependant, une amie de Régine confie à la police que la jeune femme lui avait dit que le curé était le père. Placé en garde à vue le 5 décembre 1956, quarante huit heures après l’assassinat, Guy Desnoyers nie avec véhémence.

Il est rapidement acculé à révéler la vérité par la rumeur et avouer son crime, d’autant plus qu’une douille de calibre 6.35 a été retrouvée à l’endroit du crime et qu’il a justement un permis de détention d’arme pour ce calibre.

En cette période d’Avent et de saint Nicolas, l’affaire fait grand bruit. Il est écroué en prison sous un faux nom pour éviter toute vengeance. L’Église organise des cérémonies expiatoires pour ses crimes.

LE PROCES ET LA CONDAMNATION

À l’époque, toute la France est horrifiée par ce double crime odieux. Le procès débute à la Cour d’assises de Nancy le 24 janvier 1958, un an après les faits.

La foule massée au palais de justice réclame la peine de mort.

Le 26 janvier, après deux jours de procès, le procureur donne raison à la foule dans son réquisitoire :

« Je ne sais si ce Dieu que vous avez ignominieusement servi aura pitié de vous à l’heure, peut-être proche, de votre mort. Moi, je ne connais que la justice des hommes et je sais qu’elle ne peut vous pardonner. »

L’avocat de la défense lui répond : »Je vous demanderai de ne pas le faire mourir. Ce droit n’appartient à personne. La loi permet de punir sans faire mourir. »

Avant les délibérations des jurés, Guy Desnoyers fait une dernière déclaration :
« Je suis prêtre, je reste prêtre, je réparerai en prêtre. Je m’abandonne à vous parce que je sais que devant moi vous tenez la place de Dieu. »

Après une heure et quarante minutes de délibération, les sept jurés lorrains rendent leur verdict. À toutes les questions posées (sur le double crime, sur l’infanticide et sur la préméditation), les réponses des jurés ont été « oui» à la majorité.

Toutefois on reconnut à l’accusé des circonstances atténuantes, ce qui lui permit d’échapper à la peine capitale. Il est alors condamné aux travaux forcés à perpétuité.

En août 1978, après vingt-deux ans de détention, Guy Desnoyers est devenu le plus ancien prisonnier de France. Il obtient une liberté conditionnelle.

Différentes rumeurs le voient dans le Sud de la France, en Louisiane, ou en ménage avec une visiteuse de prison. Comme le prévoyait sa liberté conditionnelle, il s’est en fait retiré en l’Abbaye Sainte-Anne de Kergonan à Plouharnel dans le département du Morbihan, où il meurt le 21 avril 2010 à l’âge de 90

Source : www.vampiredevils.skyrock.com