TITRE III : DETECTION DU BLANCHIMENT DE CAPITAUX ET DU FINANCEMENT DU TERRORISME / CHAPITRE 1: CELLULE NATIONALE DE TRAITEMENT DES INFORMATIONS FINANCIERES, CENTIF (2016)

SECTION 1 :

CREATION ET ATTRIBUTIONS DE LA CENTIF

ARTICLE 59

CREATION DE LA CENTIF

Il est institué, sous la dénomination de « Cellule Nationale de Traitement des Informations Financières ou CENTIF « , une autorité administrative, placée sous la tutelle du Ministre chargé des Finances. La CENTIF est dotée de l’autonomie financière et d’un pouvoir de décision autonome sur les matières relevant de sa compétence.

 

ARTICLE 60

ATTRIBUTIONS DE LA CENTIF

La CENTIF a pour mission le traitement et la transmission d’informations, en vue de la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme.

A ce titre, elle est chargée :

1. de recueillir, d’analyser, d’enrichir et d’exploiter tout renseignement propre il établir l’origine ou la destination des sommes ou la nature des opérations ayant fait l’objet d’une déclaration ou d’une information reçue, au titre des dispositions des articles 15, 36, 43, 70. 79. 80, 86 et 111 de la présente loi ;

2. de recevoir toutes autres informations nécessaires il l’accomplissement de sa mission, notamment celles communiquées par les autorités de contrôle ainsi que les officiers de police judiciaire, qu’elle traite, le cas échéant, comme en matière de déclaration d’opération suspecte ;

3. de demander la communication, par les assujettis ainsi que par toute personne physique ou morale, d’informations détenues par eux et susceptibles de permettre d’enrichir les déclarations de soupçons ;

4. d’effectuer ou de faire réaliser des études périodiques sur l’évolution des techniques utilisées aux fins du blanchiment de capitaux et du financement du terrorisme au niveau du territoire national ;

5. d’animer et de coordonner, en tant que de besoin, aux niveaux national et international, les moyens d’investigation dont disposent les administrations ou services relevant du Ministère en charge des Finances du Ministère en charge de la Justice et du Ministère en charge de la Sécurité ainsi que les organismes qui y sont rattachés, pour la recherche des infractions induisant des obligations de déclaration ;

6. de participer il l’étude des mesures il mettre en œuvre pour faire échec aux circuits financiers clandestins, au blanchiment de capitaux et au financement du terrorisme ;

7. de développer, en relation avec les directions concernées relevant du Ministère en charge des Finances, du Ministère en charge de la Justice et du Ministère en charge de la Sécurité, l’action internationale de lutte contre les circuits financiers clandestins, le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme.

La CENTIF est également chargée d’assurer, dans le respect des compétences propres il chacune d’elles, une coopération efficace et la concertation des autorités nationales, directement ou indirectement concernées par la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme.

Elle émet des avis sur la mise en œuvre de la politique de l’Etat en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme. A ce titre, elle propose toutes réformes nécessaires au renforcement de l’efficacité de la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme.

La CENTIF élabore des rapports périodiques, au moins une fois par trimestre, et un rapport annuel, qui analysent l’évolution des activités de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme au plan national et international, et procède à l’évaluation des déclarations recueillies. Ces rapports sont soumis au Ministre chargé des Finances.

 

SECTION II :

ORGANISATION ET FONCTIONNEMENT DE LA CENTIF

ARTICLE 61

COMPOSITION DE LA CENTIF

La CENTIF est composée de six membres, à savoir :

1. un haut fonctionnaire issu, sort de la Direction des Douanes, soit de la Direction du Trésor, soit de la Direction des Impôts, ayant rang de Directeur d’Administration centrale, désigné par le Ministre chargé des Finances. Il assure la présidence de la CENTIF

2. un magistrat spécialisé dans les questions financières, désigné par le Ministre chargé de la Justice ;

3. un haut fonctionnaire, Officier de la Police Judiciaire, désigné par le Ministre chargé de la Sécurité :

4. un représentant de la BCEAO, assurant le secrétariat de la CENTIF :

5. un chargé d’enquêtes, Inspecteur des Services des Douanes, désigné par le Ministre chargé de l’Administration douanière ;

6. un chargé d’enquêtes, Officier de Police Judiciaire, désigné par le Ministre chargé de la Sécurité.

Les membres de la CENTIF exercent leurs fonctions à titre permanent. La durée du mandat du Président de la CENTIF est de cinq ans, non renouvelable.

La durée du mandat des autres membres de la CENTIF est de trois ans, renouvelable une fois.

 

ARTICLE 62

PERSONNEL DE LA CENTIF

Outre les membres désignés à l’article 61 ci-dessus, la CENTIF dispose pour son fonctionnement, d’un personnel administratif et technique composé d’agents recrutés conformément aux lois et règlements en vigueur.

 

ARTICLE 63

CORRESPONDANTS DE LA CENTIF

Dans l’exercice de ses attributions, la CENTIF peut recourir à des correspondants au sein des Services de la Police, de la Gendarmerie, des Douanes, du Trésor, des Impôts ainsi que des Services Judiciaires de l’Etat et de tout autre Service dont le concours est jugé nécessaire dans le cadre de la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme.

Les correspondants identifiés sont désignés ès qualité par arrêté de leur Ministre de tutelle.

Elle émet des avis sur la mise en œuvre de la politique de l’Etat en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme.

A ce titre, elle propose toutes réformes nécessaires au renforcement de l’efficacité de la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme.

La CENTIF élabore des rapports périodiques, au moins une fois par trimestre, et un rapport annuel, qui analysent l’évolution des activités de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme au plan national et international, et procède à l’évaluation des déclarations recueillies. Ces rapports sont soumis au Ministre chargé des Finances.

 

ARTICLE 64

DESIGNATION D’UN DECLARANT, CORRESPONDANT
DE LA CENTIF AU NIVEAU DES ASSUJETTIS

Les institutions financières communiquent à la CENTIF et à leur autorité de contrôle, l’identité de leurs dirigeants ou préposés habilités à procéder aux déclarations prescrites à l’article 79 de la présente loi. Les autres personnes assujetties communiquent également à la CENTIF l’identité et la qualité de la personne habilitée à procéder à cette déclaration, en application de l’article 79 de la présente loi.

Tout changement concernant les personnes habilitées, en application des alinéas 1 et 2 ci-dessus, qui répondent à l’appellation de déclarant, doit être porté, sans délai, à la connaissance de la CENTIF et de leur autorité de contrôle, le cas échéant. Tout dirigeant d’une personne morale mentionnée aux articles 5 et 6 de la présente loi ou préposé de cette personne morale, peut prendre l’initiative de déclarer lui-même à la CENTIF, dans des cas exceptionnels, en raison notamment de l’urgence, une opération lui paraissant devoir l’être, en application de l’article 79 de la présente loi.

Cette déclaration est confirmée, dans les meilleurs délais, par la personne habilitée, Les personnes mentionnées à l’article 6 de la présente loi s’acquittent personnellement de l’obligation de déclaration mentionnée à l’article 79, quelles que soient les modalités de leur exercice professionnel. La personne désignée répond aux demandes de la CENTIF et de l’autorité de contrôle, le cas échéant, et assure la diffusion aux membres concernés du personnel des informations, avis ou recommandations de caractère général qui en émanent.

Les personnes assujetties veillent à ce que les fonctions de correspondant soient assurées avec la continuité nécessaire pour être en mesure de répondre, dans les délais impartis, aux demandes de la CENTIF.

 

ARTICLE 65

CONFIDENTIALITE

Les membres de la CENTIF et leurs correspondants mentionnés à l’article 63 ci-dessus, prêtent serment devant la Cour d’Appel du lieu de son siège avant d’entrer en fonction. Les membres de la CENTIF, leurs correspondants ainsi que le personnel de la Cellule sont tenus au respect du secret des informations recueillies, qui ne pourront être utilisées à d’autres fins que celles prévues par les dispositions de la présente loi.

Le personnel de la CENTIF est soumis aux obligations de confidentialité et de respect du secret professionnel.

 

ARTICLE 66

DIVULGATION DES INFORMATIONS TRANSMISES A LA CENTIF

La divulgation des informations détenues par la CENTIF est interdite. Elles ne peuvent être utilisées à d’autres fins que celles prévues au présent chapitre.

Nonobstant les dispositions de l’alinéa 1 ci-dessus, et sous réserve qu’elles soient en relation avec les faits susceptibles de faire l’objet d’une déclaration de soupçon, la CENTIF est autorisée à communiquer des informations qu’elle détient à l’Administration des Douanes, des Impôts, du Trésor et aux services de Police Judiciaire,

Elle peut également transmettre aux services de renseignement spécialisés des informations relatives à des faits qui sont susceptibles de révéler une menace contre les intérêts fondamentaux de la Nation en matière de sécurité publique et de sûreté de l’Etat.

Elle peut aussi transmettre à l’Administration Fiscale, qui peut les utiliser pour l’exercice de ses missions, des informations sur des faits susceptibles de relever de la fraude ou de la tentative de fraude fiscale.

La CENTIF peut également transmettre aux services de l’Etat chargés de préparer et de mettre en œuvre une mesure de gel ou d’interdiction de mouvement ou de transfert de fonds, des instruments financiers et des ressources économiques, des informations en relation avec l’exercice de leur mission.

 

ARTICLE 67

TRAITEMENT DES DECLARATIONS DE SOUPÇONS PAR LA CENTIF

La CENTIF accuse réception de toute déclaration de soupçon écrite. Elle traite et analyse immédiatement les informations recueillies et procède, le cas échéant, à des demandes de renseignements complémentaires auprès du déclarant, des autres assujettis, des Cellules de Renseignements Financiers étrangères ainsi que de toute autorité publique ou de contrôle.

Lorsque ses investigations mettent en évidence des faits susceptibles de relever du blanchiment du produit d’une activité criminelle ou du financement du terrorisme, la CENTIF saisit le Procureur de la République prés le Tribunal de Première Instance d’Abidjan.

 

ARTICLE 68

OPPOSITION A L’EXECUTION D’UNE OPERATION
AYANT FAIT L’OBJET D’UNE DECLARATION DE SOUPÇON

Lorsque les circonstances l’exigent, la CENTIF peut, sur la base d’informations graves, concordantes et fiables en sa possession, faire opposition à l’exécution de « opération ayant fait l’objet d’une déclaration de soupçon avant l’expiration du délai d’exécution mentionné par le déclarant. Cette opposition est notifiée à ce dernier par écrit et fait obstacle à l’exécution de l’opération pendant une durée qui ne peut excéder quarante-huit (48) heures.

Le Président du Tribunal de Première Instance d’Abidjan peut, sur requête de la CENTIF, proroger le délai d’opposition sans que ce délai ne dépasse vingt-quatre (24) heures ou ordonner le séquestre provisoire des fonds, comptes ou titres concernés par la déclaration de soupçon. Il peut présenter une requête ayant le même objet.

A défaut d’opposition ou si, au terme du délai de quarante-huit (48) heures prévu à « alinéa1 du présent article, aucune décision du juge d’instruction n’est parvenue à l’auteur de la déclaration, l’opération qui a fait l’objet de déclaration de soupçon peut être exécutée.

A défaut de poursuite judiciaire contre le donneur d’ordre dans un délai de quinze (15) jours, à compter de la date de l’ordonnance de séquestre provisoire, celle-ci devient caduque.

 

ARTICLE 69

SUITES DONNEES AUX DECLARATIONS DE SOUPÇONS

Lorsque les opérations mettent en évidence des faits susceptibles de constituer l’infraction de blanchiment de capitaux ou de financement du terrorisme, la CENTIF transmet un rapport sur ces faits au Procureur de la République prés le Tribunal de Première Instance d’Abidjan, qui saisit immédiatement le juge d’instruction.

Ce rapport est accompagné de toutes pièces utiles, à l’exception de la déclaration de soupçon. L’identité du préposé à la déclaration ne doit pas figurer dans ledit rapport qui fait foi jusqu’à preuve du contraire.

La CENTIF avise, en temps opportun, l’assujetti déclarant des conclusions de ses investigations.

 

ARTICLE 70

DROIT DE COMMUNICATION DE LA CENTIF

La CENTIF peut demander que les pièces conservées, en application des dispositions de l’article 35 de la présente loi, lui soient communiquées, quel que soit le support utilisé pour leur conservation et dans les délais qu’elle fixe.

La CENTIF reçoit, à l’initiative des Administrations de l’Etat, des Collectivités Territoriales, des Etablissements Publics et de toute autre personne investie d’une mission de service public, toutes les informations nécessaires à l’accomplissement de sa mission ou les obtient de ceux-ci à sa demande.

L’autorité judiciaire, les juridictions financières et les Officiers de Police Judiciaire peuvent rendre la CENTIF destinataire de toute information aux mêmes fins.

 

ARTICLE 71

OBLIGATION D’INFORMATION DE LA CENTIF

Lorsque, sur le fondement d’une déclaration de soupçon, la CENTIF saisit le Procureur de la République, elle en informe immédiatement le déclarant.

La CENTIF peut, si les circonstances le justifient, informer les personnes qui lui ont transmis les informations, en application de l’alinéa premier de l’article 67 de la présente loi, qu’elle a saisi le Procureur de la République près le Tribunal de Première Instance d’Abidjan sur la base de ces informations.

La CENTIF partage avec ses correspondants les résultats de ses études, si nécessaire.

 

ARTICLE 72

RESPONSABILITE DE LA CENTIF OU DE SES MEMBRES

La responsabilité civile de la CENTIF et de ses membres ne peut être engagée, à l’occasion de l’exercice de leurs missions légales, qu’en cas de dol ou de faute lourde.

 

ARTICLE 73

FINANCEMENT DE LA CENTIF

Les ressources de la CENTIF proviennent du budget de l’Etat ainsi que des apports consentis par les Institutions de l’UEMOA et les partenaires au développement.